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cas de perfidie, on pût, dans chaque mesure, diviser et distinguer, faire la part précise de responsabilité qui revenait à chacun.

La promesse ne fut pas tenue ; le roi ne le voulut point. Roland alors adopta deux moyens qui le couvraient. Convaincu que la publicité est l’âme d’un État libre, il publia chaque jour dans un journal, le Thermomètre, tout ce qui pouvait se donner utilement des décisions du conseil ; d’autre part, il minuta, par la plume de sa femme, une lettre vive et forte, pour donner au roi, et plus tard peut-être au public, si le roi se moquait de lui.

Cette lettre n’était point confidentielle ; elle ne promettait nullement le secret, quoi qu’on ait dit. Elle s’adressait visiblement à la France autant qu’au roi, et disait, en propres termes, que Roland n’avait recouru à ce moyen qu’au défaut du secrétaire et du registre qui eussent pu témoigner pour lui.

Elle fut remise par Roland le 10 juin, le même jour où la Cour faisait jouer contre l’Assemblée une nouvelle machine, une pétition menaçante, où l’on disait perfidement, au nom de huit mille prétendus gardes nationaux, que l’appel des vingt mille fédérés des départements était un outrage à la garde nationale de Paris.

Le 11 ou 12, le roi ne parlant pas de la lettre, Roland prit le parti de la lire tout haut en conseil. Cette pièce, vraiment éloquente, est la suprême protestation d’une loyauté républicaine, qui pourtant montre encore au roi la dernière porte de salut.