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l’augmenter au besoin, leur mauvaise humeur, leur négligence, tout cela éclata sur le terrain, au moment le plus dangereux. Les infortunés volontaires de la garde nationale, qui, au fort de l’hiver même, étaient venus, pleins d’ardeur, couvrir la frontière, étaient délaissés sans secours de l’administration. À qui la faute ? Aux finances ? Non ; l’impôt se recouvrait ; les millions de la liste civile arrivaient toujours à point pour solder les journalistes de la contre-révolution, les Suleau et les Royou. Ces volontaires restaient sans fusils. Il leur arriva, pendant deux ou trois jours, au moment d’entrer en campagne, de ne point avoir de vivres. La ligne n’était pas mieux. À toute réclamation, refus, dédains insolents. Les munitionnaires, employés, étaient amis de l’ennemi ; tous les commis de la guerre étaient pour la paix quand même. Le vieux maréchal Rochambeau ne voulait de guerre que défensive. Il était mortifié de voir Dumouriez adresser les ordres tout droit à ses lieutenants. Les embarras qu’éprouvait le mouvement d’invasion ne lui déplaisaient nullement. Il hochait la tête, haussait les épaules, ne présageait rien de bon.

Dumouriez, tout en faisant de la chevalerie avec la reine et le roi, comme on voit dans ses Mémoires, n’en était pas moins lié en dessous avec la maison d’Orléans. Il lui fallait absolument un roi, une cour, les facilités de gaspillage que donne seule la monarchie. Il voyait dans le jeune duc de Char-