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L’humilité sauva les Jacobins, l’orgueil perdit les Feuillants. En réalité, ces derniers étaient très forts. Ils avaient emmené de l’ancien club à peu près tous les députés, non pas seulement les modérés, les constitutionnels, mais de très fervents Jacobins, comme Merlin de Douai, Dubois-Crancé, etc. Intimement unis à l’Assemblée nationale, établis dans ses bureaux mêmes, ils participaient à sa majesté. Les Feuillants qu’ils occupaient (rue Saint-Honoré, en face de la place Vendôme) était un local immense et magnifique, splendide fondation de Henri III, successivement agrandie par ses successeurs. Le couvent formait un carré énorme, qui communiquait par un couloir avec le Manège, et de là avec les Tuileries, la terrasse des Feuillants.

Et pourtant c’était une faute d’avoir quitté l’ancien local. Celui-ci avait ce qui achalandé les vieilles boutiques renommées : il était sombre, laid, mesquin. Sans ostentation, sans emphase, il ne montrait rien qu’une porte basse et un passage assez sale, sur la rue Saint-Honoré. La maison était une réforme des Jacobins ; le couvent était triste et pauvre. La bibliothèque, où d’abord s’était tenu le club avant de passer dans l’église, n’avait guère d’autre ornement qu’un curieux petit tableau qui rendait sensible aux yeux le secret mystère de l’association janséniste, le mécanisme ingénieux dont elle s’était servie pour faire circuler, malgré la police, les Nouvelles ecclésiastiques, sans jamais être surprise. L’église n’avait aucun monument important, sauf le tombeau de Campanella,