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des outils, on ouvre les planches, on trouve les deux coupables, bien penauds, et qui font semblant de dormir. Leur affaire était mauvaise, on ne plaisantait pas alors sur l’autel de la Patrie ; un officier périt à Brest pour le crime de s’en être moqué. Ici, circonstance aggravante, ils avouent leur vilaine envie. La population du Gros-Caillou est toute de blanchisseuses, une rude population de femmes, armées de battoirs, qui ont eu parfois dans la Révolution leurs jours d’émeutes et de révoltes. Ces dames reçurent fort mal l’aveu d’un outrage aux femmes. D’autre part, parmi la foule, d’autres bruits couraient ; ils avaient, disait-on, reçu, pour tenter un coup, promesse de rentes viagères ; le baril d’eau, en passant de bouche en bouche, devint un baril de poudre ; puis la conséquence : « Ils voulaient faire sauter le peuple… » La garde ne peut plus les défendre, on les arrache, on les égorge ; puis, pour terrifier les aristocrates, on coupe les deux têtes, on les porte dans Paris. À huit heures et demie ou neuf heures, elles étaient au Palais-Royal.

Précisément, à cette heure, les officiers municipaux et notables, avec huissiers et trompettes, proclamaient aux carrefours les décisions de l’Assemblée, le discours sévère du président et les mesures répressives.

Voilà donc, dès le matin, les deux choses en face, qui devaient servir également la cause des royalistes : la menace, le crime à punir ; le glaive levé déjà et l’occasion de frapper.