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au petit bourg d’Étoile, que pour la première fois la province est abjurée ; quatorze communes rurales du Dauphiné s’unissent entre elles et se donnent à la grande unité française (29 novembre 1789). Belle réponse de ces paysans aux politiques, aux Mounier, qui faisaient appel à l’orgueil provincial, à l’esprit de division, qui essayaient d’armer le Dauphiné contre la France.

Cette fédération, renouvelée à Montélimart, n’est plus seulement dauphinoise, mais mélée de plusieurs provinces des deux rives, Dauphiné et Vivarais, Provence et Languedoc. Cette fois donc, ce sont des Français. — Grenoble y envoie d’elle-même, malgré sa municipalité, en dépit des politiques ; elle ne se soucie plus de son rôle de capitale ; elle aime mieux être France. — Tous ensemble ils répètent le serment sacré que les paysans ont fait déjà en novembre : « Plus de province ! la patrie !… » Et s’aider, se nourrir les uns les autres, se passer les blés de main en main par le Rhône (13 décembre).

Fleuve sacré, qui, traversant tant de peuples, de races, de langues, semble avoir hâte d’échanger les produits, les sentiments, les pensées, il est, dans son cours varié, l’universel médiateur, le sociable Genius, la fraternité du Midi. C’est au point aimable et riant de son mariage avec la Saône que, sous Auguste, soixante nations des Gaules avaient dressé leur autel. Et c’est au point le plus austère, au passage sérieux, profond, que dominent les monts cuivrés de l’Ardèche, dans la romaine Valence, que