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avec grande répugnance qu’elle vint siéger dans ce sombre Paris d’octobre, parmi cette mer de peuple. Cent cinquante députés aimèrent mieux prendre des passeports. Mounier, Lally, se sauvèrent.

Les deux premiers hommes de France, le plus populaire, le plus éloquent, La Fayette et Mirabeau, revinrent royalistes à Paris.

M. de La Fayette avait été mortifié d’être mené à Versailles, tout en paraissant mener. Dans son triomphe involontaire, il était presque autant piqué que le roi. Il fit en rentrant deux choses. Il enhardit la municipalité à faire poursuivre au Châtelet la feuille sanglante de Marat. Lui-même il alla trouver le duc d’Orléans, l’intimida, lui parla haut et ferme, et chez lui, et devant le roi, lui faisant sentir qu’après le 6 octobre sa présence à Paris inquiétait, donnait des prétextes, excluait la tranquillité. Il le poussa ainsi à Londres. Le duc voulant en revenir, La Fayette lui fit dire que, le lendemain de son retour, il se battrait avec lui.

Mirabeau, privé de son duc et voyant décidément qu’il n’en tirerait jamais parti, se tourna bonnement avec l’aplomb de la force, et comme un homme nécessaire qu’on ne peut pas refuser, du côté de La Fayette (10-20 octobre) ; il lui proposait nettement de renverser Necker et de gouverner à deux[1]. C’était certainement la seule chance de salut qui restât au

  1. Lire les trois principaux témoins, Mirabeau, La Fayette, et Alexandre de Lameth.