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principe ! » Ce qui n’empêcha pas les meneurs de l’Assemblée de professer, tout au moins de pratiquer la doctrine du Salut public. Ils n’hésitèrent pas à l’avouer dans une occasion solennelle.

Les Girondins et Montagnards commencent précisément de même. Robespierre répète, dans la discussion des colonies, le mot de Dupont (de Nemours). Dans la question de la liberté d’émigrer, il s’abstient, laisse parler les professeurs du Salut public (février 1791). Cependant, dès 1789, il a conseillé la violation du secret des lettres ; on peut, sans peine, prévoir que, s’il arrive à tenir le timon des affaires, il ne défendra pas les principes plus obstinément que ne font les Constituants et les Girondins. Le grand instrumentum regni, la doctrine du Salut public, est invariablement réclamée par les puissants.

Ils n’ont pas une autre recette. Tous, Girondins, Montagnards, partent de l’idée que seuls ils sauront sauver le peuple. Par quelle voie ? Nulle qui leur soit propre. Ils n’ont ni le temps ni l’idée même de chercher des choses nouvelles. Ils n’ajoutent rien, comme philosophie, aux théories de Rousseau, à la formule de Sieyès, qui en dérive ; je parle du droit du nombre ; seulement ils l’appliquent diversement. Sur quoi ce droit est-il fondé ? Quel est le droit des classes les plus nombreuses, des classes non cultivées, le droit de l’instinct, de l’inspiration naturelle ? En quoi ces classes voient-elles mieux, souvent, que les classes cultivées ? Ils ne