développa avec une gravité souvent éloquente cette thèse de morale politique, que le législateur doit se faire un devoir de rentrer dans la foule des citoyens et se dérober même à la reconnaissance. L’Assemblée, fatiguée de son comité de constitution, d’un décemvirat qui parlait toujours et légiférait toujours, sut bon gré à Robespierre d’avoir le premier exprimé une pensée juste et vraie, qu’on peut résumer ainsi : « La constitution n’est point sortie de la tête de tel ou tel orateur, mais du sein même de l’opinion qui nous a précédés et qui nous a soutenus. Après deux années de travaux au-dessus des forces humaines, il ne nous reste qu’à donner à nos successeurs l’exemple de l’indifférence pour notre immense pouvoir, pour tout autre intérêt que le bien public. Allons respirer dans nos départements l’air de l’égalité. »
Et il ajouta ce mot impérieux, impatient : « Il me semble que, pour l’honneur des principes de l’Assemblée, cette motion ne doit pas être décrétée avec trop de lenteur. » Loin d’être blessée de ce mot, l’Assemblée applaudit, ordonne l’impression, veut aller aux voix. Chapelier demande en vain la parole. La proposition est votée à la presque unanimité.
Le prôneur habituel et très zélé de Robespierre, Camille Desmoulins, dit avec raison qu’il regarde ce décret comme un coup de maître : « On pense bien qu’il ne l’a emporté ainsi de haute lutte que parce qu’il avait des intelligences dans l’amour-propre de la grande majorité, qui, ne pouvant être