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Loin de là, elle les aida puissamment par sa maladresse. Elle les multiplia, les fortifia en les persécutant et mettant l’intérêt de leur côté. Elle leur valut la propagande la plus énergique et la plus active. En les écrasant dans Paris, elle les étendit en France, en Europe ; elle en étouffa des centaines, elle en enfanta des millions.

Les Jacobins semblent se porter pour héritiers directs des prêtres. Ils en imitent l’irritante intolérance, par laquelle le clergé a suscité tant d’hérésies. Ils suivent hardiment le vieux dogme : « Hors de nous, point de salut. » Sauf les Cordeliers, qu’ils ménagent, dont ils parlent le moins qu’ils peuvent, ils persécutent les clubs, même révolutionnaires. Le Cercle social, par exemple, réunion franc-maçonnique, à qui l’on ne pouvait guère reprocher que des ridicules, club politiquement timide, mais socialement beaucoup plus avancé que les Jacobins, est durement attaqué par eux. L’orléaniste Laclos, qui, comme on a vu, publiait la correspondance des Jacobins, dénonça le Cercle social, et dans son journal, et au club. Le Jacobin Chabroud, qui, la veille même, avait été nommé président du Cercle, n’osa le défendre. Camille Desmoulins s’y hasarda et fut arrêté aux premiers mots par l’improbation universelle des Jacobins. Il s’en dédommagea le lendemain et écrivit son admirable no 54, immortel manifeste de la tolérance politique.

Une guerre plus violente encore fut celle que les Jacobins firent au Club des Amis de la constitution