Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 2.djvu/267

Cette page a été validée par deux contributeurs.

pour ceux qui vous foulent aux pieds, elle nous a fait bien du mal ; vous, elle vous a perdus.

Ah ! vous ne saurez jamais ce que fut pour vous le cœur de la France !… Lorsque, en mai 1790, un de nos députés, parlant de l’Angleterre, s’avisa de dire : « Notre rivale, notre ennemie », ce fut dans l’Assemblée un murmure universel. On faillit abandonner l’Espagne, plutôt que de se montrer défiant pour nos amis les Anglais.

Tout cela en 1790, pendant que le ministère anglais et l’opposition réunis lançaient le livre de Burke.

L’effet de cette pauvre déclamation fut immense sur les Anglais. Les clubs qui s’étaient formés à Londres pour soutenir les principes de notre Révolution furent en grande partie dissous. Le libéral lord Stanhope effaça son nom de leurs livres (novembre 1790). Des publications nombreuses, habilement dirigées, multipliées à l’infini, vendues à vil prix dans le peuple, le tournèrent si bien, qu’au 14 juillet 1791 une réunion d’Anglais célébrant à Birmingham l’anniversaire de la Bastille, la populace furieuse alla saccager, briser, brûler les meubles, la maison de Priestley, son laboratoire de chimie. Il quitta ce pays ingrat et passa en Amérique.

Voilà la fête qu’on faisait en Angleterre à l’ami de la France. Et voici, la même année, celle qu’on faisait en France aux Anglais.

En décembre 1791, nos Jacobins, présidés alors par les Girondins Isnard et Lasource, décidèrent que