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Ah ! tout être n’est-il donc pas sacré dans ces moments ? Une femme, une société qui enfante, n’a-t-elle pas droit au respect, aux vœux du genre humain ?

Maudit qui, surprenant un Newton dans l’enfantement du génie, empêche une idée de naître ! Maudit qui, trouvant la femme au moment douloureux où la nature entière conjure avec elle, prie et pleure pour elle, empêche un homme de naître ! Maudit trois fois, mille fois, celui qui, voyant ce prodigieux spectacle d’un peuple à l’état héroïque, magnanime, désintéressé, essaye d’entraver, d’étouffer ce miracle, d’où naissait un monde !

Comment les nations vinrent-elles à s’accorder, à s’armer contre l’intérêt des nations ? Sombre et ténébreux mystère !

Déjà on avait vu un pareil miracle du diable dans nos guerres de religion ; je parle de la grande œuvre jésuitique qui, en moins d’un demi-siècle, fit de la lumière une nuit, cette affreuse nuit de meurtres qu’on appelle la Guerre de Trente-Ans. Mais enfin il y fallut un demi-siècle et l’éducation des Jésuites ; il fallut former, élever une génération exprès, dresser un monde nouveau à l’erreur et au mensonge. Ce ne furent point les mêmes hommes qui passèrent du blanc au noir, qui virent d’abord la lumière, puis jurèrent qu’elle était la nuit.

Ici le tour est plus fort. Il suffit de quelques années.

Ce succès rapide fut dû à deux choses :

1o Un emploi habile, immense, de la grande ma-