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impuissant, et du monde, et de l’âme humaine, un peuple semblait en donner la réalité dans cette heure rapide, jouer la comédie divine d’union et de concorde, que nous n’avons jamais qu’en rêve.


Figurez-vous donc tous les peuples qui, de pensée, de cœur, de regard et d’attention, sont tous élancés vers la France. Et dans la France elle-même, voyez-vous toutes ces routes, noires d’hommes, de voyageurs en marche, qui des extrémités se dirigent vers le centre ?… L’union gravite à l’unité.

Nous avons vu les unions se former, les groupes se rallier entre eux, et, ralliés, chercher une centralisation commune ; chacune des petites Frances a tendu vers son Paris, l’a cherché d’abord près de soi. Une grande partie de la France crut un moment le trouver à Lyon (30 mai). Ce fut une prodigieuse réunion d’hommes, telle qu’il n’y fallait pas moins que les grandes plaines du Rhône. Tout l’Est, tout le Midi avait envoyé ; les seuls députés des gardes nationales étaient cinquante mille hommes. Tels avaient fait cent lieues, deux cents lieues, pour y venir. Les députés de Sarrelouis y donnaient la main à ceux de Marseille. Ceux de la Corse eurent beau se hâter, ils ne purent arriver que le lendemain[1].

  1. J’ai sous les yeux une chose très belle, que je regrette vivement de ne pouvoir insérer, un récit de cette grande fédération écrit (tout exprès pour moi) par un octogénaire avec le plus jeune et le plus touchant enthousiasme… « Ô flamme, qu’étais-tu, si la cendre est brûlante ?… »