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La seconde affaire, non moins grave, fut la question de savoir si l’Assemblée se dissoudrait ; les pouvoirs de plusieurs députés étaient bornés à un an, et cette année finissait. Déjà, avant le 6 octobre, on avait proposé (et avec raison alors) de dissoudre l’Assemblée. La cour attendait, épiait le moment de la dissolution, l’entr’acte, le moment toujours périlleux entre l’Assemblée qui n’est plus et celle qui n’est pas encore. Qui régnerait dans l’intervalle, sinon le roi, par ordonnances ? Le pouvoir une fois repris, l’épée une fois ressaisie, c’était à lui de la garder.

Maury, Cazalès, dans des discours pleins de force, mais irritants, provocants, demandèrent à l’Assemblée si ses pouvoirs étaient illimités, si elle se croyait une Convention nationale ; ils insistaient sur cette distinction de convention, d’assemblée, de législature. Ces arguties poussèrent Mirabeau dans une de ces magnifiques colères qui montaient jusqu’au sublime : « Vous demandez comment, de députés de bailliages, nous nous sommes faits Convention ? Je répondrai : Le jour où, trouvant notre salle fermée, hérissée, souillée de baïonnettes, nous courûmes au premier lieu qui pût nous réunir et jurâmes de périr plutôt… ce jour-là, si nous n’étions Convention, nous le sommes devenus… Qu’ils aillent chercher maintenant dans la vaine nomenclature des publicistes la définition de ces mots : Convention nationale ?… Messieurs, vous connaissez tous le trait de ce Romain qui, pour sauver sa patrie d’une grande conspiration, avait été contraint d’outrepasser les pouvoirs que lui