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Pour la reine, pour le roi, La Fayette surmonta la répugnance que lui inspirait Mirabeau.

Dès le 15 octobre, Mirabeau s’était offert, par une note, que son ami La Marck, l’homme de la reine, ne montra pas même au roi. — Le 20, nouvelle note de Mirabeau ; mais celle-ci, il l’envoya à La Fayette, qui s’aboucha avec l’orateur, le conduisit chez le ministre Montmorin.

Ce secours inespéré, qui leur tombait du ciel, fut tout à fait mal reçu. Mirabeau aurait voulu que le roi se contentât de un million pour toute dépense ; qu’il se retirât, non à Metz dans l’armée, mais à Rouen, et que de là il publiât des ordonnances plus populaires que les décrets de l’Assemblée[1]. Ainsi point de guerre civile, le roi se faisant plus révolutionnaire que la Révolution même.

Étrange projet, qui prouve la confiance, la facile crédulité du génie !… Si la cour l’eût accepté pour un jour, si elle eût consenti de feindre, c’eût été pour faire pendre le lendemain Mirabeau.

Dès novembre, il put bien voir ce qu’il avait à attendre de ceux qu’il voulait sauver. Il lui fallait le ministère, et garder en même temps sa position dominante dans l’Assemblée nationale. Pour cela, il avait besoin que la cour lui ménageât l’appui, la connivence, le silence du moins, des députés royalistes. Loin de là, le garde des sceaux avertit, anima plusieurs députés, même de l’opposition, contre le

  1. Voir les pièces citées dans l’Histoire de M. Droz et les Mémoires de Mirabeau.