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des filles près de leurs pères. Une femme figurait dans les vainqueurs de la Bastille.

Des moines, croyant aussi qu’ils étaient hommes et citoyens, étaient venus prendre leur part de cette grande croisade. Les mathurins étaient en ligne sous la bannière de leur ordre, devenu le drapeau du district des Mathurins. Des capucins portaient sur l’épaule l’épée, le mousquet. Les dames de la place Maubert avaient mis la révolution de Paris sous la protection de sainte Geneviève, et la veille offert un tableau où la sainte encourageait l’ange exterminateur à renverser la Bastille, qu’on voyait croulante, avec des couronnes, des sceptres brisés.

On applaudissait deux hommes, Bailly, La Fayette ; c’était tout. Les députés marchaient autour de la voiture du roi, l’air triste, agité ; il y avait quelque chose de sombre dans cette fête… Ces armes sauvages, ces fourches et ces faux ne charmaient point le regard. Les canons qui dormaient là sur ces places, muets, parés de fleurs, semblaient ne pas bien dormir… Sur tous les semblants de paix planait une image de guerre, claire et significative, les lambeaux déchirés du drapeau de la Bastille.

Le roi descend et Bailly lui présente la nouvelle cocarde, aux couleurs de la Ville, qui devient celle de la France. Il le prie d’accepter « ce signe distinctif des Français ». Le roi la mit à son chapeau, et, séparé de sa suite par la foule, il monta la sombre voûte de l’Hôtel de Ville ; sur sa tête, les