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électeurs, Bonneville avait crié : « Aux armes ! » cri étrange dans cette assemblée des notables de Paris, et qui tombait de lui-même. Plusieurs frémirent, d’autres sourirent, et l’un d’eux prophétiquement : « Jeune homme, remettez votre motion à quinze jours. »

Aux armes ? contre une armée tout organisée qui était aux portes. Aux armes ? quand cette armée pouvait si facilement affamer la ville, quand la disette s’y faisait déjà sentir, quand on voyait la queue s’allonger à la porte des boulangers… Les pauvres gens des campagnes entraient par toutes les barrières, hâves, déguenillés, sur leurs longs bâtons de voyage. Une masse de vingt mille mendiants, qu’on occupait à Montmartre, était suspendue sur la ville ; si Paris faisait un mouvement, cette autre armée pouvait descendre. Déjà quelques-uns avaient essayé de brûler et de piller les barrières.

Il y avait à parier que la cour porterait les premiers coups. Il lui fallait faire sortir le roi des scrupules, des velléités de paix, en finir une fois avec tous les compromis… Pour cela, il fallait vaincre.

De jeunes officiers de hussards, des Sombreuil et des Polignac, allèrent jusque dans le Palais-Royal narguer la foule, et ils sortirent le sabre à la main. Visiblement la cour se croyait trop forte ; elle souhaitait des violences[1].

Le dimanche 12 juillet au matin, jusqu’à dix heures,

  1. Prenez garde, écrivait, dans une des brochures innombrables du moment, un médecin philanthrope, le docteur Marat, prenez garde… Consi-