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Le procédé de l’esprit pur est celui même de Dieu, l’art de Dieu est son art. Sa construction est trop profondément harmonique au dedans pour le paraître au dehors. Ne cherchez pas ici les droites et les angles, les lignes rigides de vos bâtiments de pierre et de marbre. Dans un organisme vivant, l’harmonie, bien autrement forte, est surtout au fond des organes.

D’abord que ce monde nouveau ait la vie matérielle ; donnons-lui pour commencement, pour première assise, la colossale Histoire naturelle[1] ; mettons l’ordre dans la nature ; pour elle l’ordre c’est la Justice.

Mais l’ordre est impossible encore. De la nature qui bouillonne et s’anime, comme au réveil de l’Etna, flamboie un volcan immense[2]. Toute science et tout art en éclatent… Une masse reste, l’éruption faite, mêlée de scories et d’or, masse énorme : l’Encyclopédie.

Voilà deux âges du jeune monde, deux jours de la création. L’ordre manque et l’unité manque. Créons l’homme, l’unité du monde, et qu’avec lui l’ordre vienne, et celle que nous attendons, cette désirée lumière de la Justice divine.

L’homme apparaît sous trois figures : Montesquieu, Voltaire et Rousseau. Trois interprètes du Juste.

Notons la Loi, cherchons la Loi ; peut-être la trouverons-nous cachée en quelque coin du globe. Peut-

  1. Buffon, t. I, 1748. — Voir l’édition de MM. Geoffroy-Saint-Hilaire.
  2. Diderot publie en 1751 les deux premiers volumes de l’Encyclopédie. M. Génin vient d’écrire sur lui une notice, que tout le monde trouvera spirituelle, brillante, pleine d’amusement et de charme. Je la trouve pénétrante, elle va au fond.