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HISTOIRE DE FRANCE

pieux de la fête, « l’entremets pitoyable », comme l’appelle Olivier de La Marche.

Un éléphant entra dans la salle, conduit par un géant sarrasin… Sur son dos s’élevait une tour, aux créneaux de laquelle on voyait une nonne éplorér, vêtue de satin blanc et noir ; ce n’était pas moins que la sainte Église. Notre chroniqueur Olivier, alors jeune et joyeux compère, s’était chargé du personnage. L’Église, dans une longue et peu poétique complainte, implora les chevaliers, et les pria de jurer sur le faisan qu’ils viendraient à son secours. Le duc jura, et tous après lui. Ce fut à qui se signalerait par le vœu le plus bizarre ; l’un jura de ne plus s’arrêter qu’il n’eût pris le Turc mort ou vif ; l’autre de ne plus porter d’armure au bras droit, de ne plus se mettre à table les mardis. Tel jura de ne pas revenir avant d’avoir jeté un Turc les jambes en l’air ; un autre, un écuyer tranchant, voua impudemment que s’il n’avait pas les faveurs de sa dame avant le départ, il épouserait au retour la première qui aurait vingt mille écus. Le duc finit par les faire taire.

Alors commença un bal où dansèrent avec les chevaliers douze Vertus, en satin cramoisi ; c’étaient les princesses elles-mêmes, les plus hautes dames. Le lendemain, le jeune comte de Charolais ouvrit un tournoi. Ces exercices, innocents dans un siècle où les armures étaient assez parfaites pour rendre l’homme invulnérable[1], inutiles aussi à une époque

  1. Il est curieux de voir combien il y a peu de blessures et combien légères dans les interminables histoires de tournois que fait Olivier de La Marche. —