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CHARLES VII. — PHILIPPE-LE-BON

gabelle, là certains droits sur les vins. La Bourgogne était si peu disposée à reconnaître ces droits, qu’elle tenait, dit-on, des hommes déguisés en marchands pour tuer les sergents royaux qui s’aventuraient à franchir la limite. D’autre part, les gens du roi ne permettaient plus aux Francs-Comtois de venir faucher sur les terres qu’ils avaient de ce côté-ci ; ils leur faisaient payer un droit de passage. De là des plaintes, des violences, une querelle infinie, interminable, sur toute la frontière.

J’ai dit comment, après le mauvais succès de la Praguerie, Philippe-le-Bon avait cru embarrasser le roi en rachetant le duc d’Orléans, en lui faisant tenir l’assemblée des grands à Nevers, laquelle, faute d’audace ou de force, ne réussit qu’à présenter des doléances. À cette guerre d’intrigues contre la France ajoutez celle des armes que le duc faisait à l’Allemagne, en se saisissant du Luxembourg[1]. Ces embarras se compliquèrent et d’une manière alarmante, en 1444, lorsque d’une part la guerre civile éclata en Hollande[2], et que de l’autre les bandes françaises et anglaises, sous la bannière du dauphin, traversèrent les Bourgognes pour aller en Suisse.

Elles auraient bien pu ne pas aller jusqu’en Suisse, la maison d’Anjou poussait le roi à la guerre. Mais la commencer contre la Bourgogne, lorsqu’on n’était encore sûr de rien du côté de l’Angleterre, c’eût été folie. La maison d’Anjou, ne pouvant agir contre son

  1. Et en se brouillant ainsi avec les maisons d’Autriche et de Saxe.
  2. App. 146.