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HISTOIRE DE FRANCE

n’en montrèrent pas moins souvent un véritable instinct politique, toujours du courage, assez d’esprit de suite, parfois de la modération. Gand, après tout, est le cœur, l’énergie des Flandres, comme leur grand centre pour les eaux, pour les populations. Ce n’est pas sans raison que tant de rivières y viennent déposer vingt-six villes en une cité, et se marier ensemble au Pont du jugement.

Le jugement suprême de la Flandre orientale résidait en effet dans l’échevinage de Gand. Les villes voisines, qui elles-mêmes étaient des capitales, des tribunaux supérieurs (la seule Alost pour cent soixante-dix cantons, deux principautés, une foule de baronnies[1]), étaient obligées d’y ressortir. Courtrai et Oudenarde, si grandes et si fortes, Alost et Dendermonde, fiefs d’Empire, libres alleux ou fiefs du soleil, n’en étaient pas moins forcées d’aller défendre leurs appels à Gand, de répondre à la loi de Gand, de reconnaître en elle un juge, et ce juge n’était que trop souvent, comme dit la vieille formule allemande, un lion courroucé.

Chose bizarre, et qui ne s’explique que par l’extrême attachement des Flamands aux traditions de familles et de communes, ces grandes villes d’industrie, loin


    les Gantais étaient fort dévots. Dans la terrible guerre de 1453, ils ne brûlèrent pas une église, quoique les églises fussent souvent des forts dont pouvait profiter l’ennemi. — À Gand, les mœurs étaient très pures. Nous lisons dans les registres criminels qu’un tribunal bannit un citoyen distingué, pour avoir offensé de propos indécents les oreilles d’une petite fille. — La Keurc des savetiers de 1304 porte que celui qui vit dans une union illégitime ne peut ni concourir aux élections ni assister aux délibérations. (Lenz.)

  1. App. 141.