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sinuer. Souffre-le, laisse autour d’eux cette touchante auréole de la bénédiction de Dieu.




J’ai parlé dans un de mes livres, d’un arbre fort et robuste (c’était un châtaignier, je crois) que j’ai vu vivre sans terre, et de l’air uniquement. Nous suspendons dans des vases certaines plantes élégantes qui végètent également sans aliment que l’atmosphère. Nos pauvres cultivateurs ne leur ressemblent que trop. Leur très-faible nourriture, qui la supplée ? Qui leur permet de faire, si peu nourris, des travaux si longs, si rudes ? La perfection de l’air où ils vivent et la puissance qu’il leur donne de tirer de cette alimentation tout ce qu’elle a de nutritif.

Eh bien ! toi qui as le bonheur d’élever et de nourrir ces deux arbres du paradis, la jeune femme qui vit en toi, et son enfant qui est toi, — songe bien que, pour qu’elle vive, qu’elle fleurisse et alimente le cher petit de bon lait, il faut lui assurer d’abord l’aliment des aliments, l’air vital. Quel malheur serait-ce, quelle triste contradiction, de la mettre, ta pure, ta chaste et charmante femme, dans la dangereuse atmosphère qui flétrirait son corps, son âme ! — Non, ce n’est pas impunément qu’une personne délicate, impressionnable et péné-