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dessus, de dire : « Écrivez ici ce que vous voulez… Je croirai, j’obéirai. Je suis là pour obéir. Je dépends tellement encore et j’appartiens tellement ! »

Incapacité absolue d’éviter aucune souffrance, incapacité de pourvoir à ce qui lui est nécessaire, voilà l’enfant à cet âge. Celle-ci surtout très-avancée, capable d’aimer et de comprendre, semblait implorer l’assistance. On eût dit la prière même. Morte, elle priait encore.

Je fus fortement ému, mais éclairé en même temps. Les nerfs de la pauvre petite me donnèrent la révélation et l’intuition très-nette de la contradiction réelle qui fait le destin de l’enfant.

D’une part, c’est la créature mobile entre toutes, qui remue fatalement. Les nerfs de la motilité sont développés et actifs avant les forces d’équilibre, qui y feraient contre-poids. Cette agitation constante nous gêne et souvent nous irrite ; nous ne songeons pas qu’à cet âge elle est la vie elle-même.

D’autre part, les nerfs de la sensibilité sont complets, par conséquent la capacité de souffrir, celle même d’aimer bien plus qu’on ne le croit communément. On le voit aux Enfants-Trouvés ; beaucoup de ceux qu’on apporte à quatre ou cinq ans, sont inconsolables et meurent.

Chose plus étonnante à cet âge si tendre, la sensibilité amoureuse est exprimée dans les nerfs plus