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dive d’une longue tradition d’industrie ; il est lui-même une œuvre d’art, de l’art humain, si inconnu, où l’humanité va s’élevant, se formant, comme puissance de création.

Qui me donnera de voir cette élite de la terre, cette foule du peuple inventeur, créateur et fabricateur, qui sue et s’use pour le monde, reprendre incessamment ses forces à la grande piscine de Dieu ! Toute l’humanité en profite ; elle fleurit du labeur énorme de ceux-ci. Elle leur doit toute jouissance, toute élégance, toute lumière. Elle prospère de leurs bienfaits, vit de leur moelle et de leur sang. Qu’on donnât à ceux-ci la rénovation de nature, l’air, la mer, un jour de repos, ce serait une justice, un bienfait encore pour le genre humain, à qui ils sont si nécessaires, et qui, demain, par leur mort, se trouvera orphelin.

Ayez pitié de vous-mêmes, pauvres hommes d’Occident. Aidez-vous sérieusement, avisez au salut commun. La Terre vous supplie de vivre ; elle vous offre ce qu’elle a de meilleur, la Mer, pour vous relever. Elle se perdrait en vous perdant. Car vous êtes son génie, son âme inventive. De votre vie, elle vit, et, vous morts, elle mourrait.