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COMME JADIS…

Quelle récolte ! Les quintots se touchent !…

Nous trébuchons parfois dans notre marche, car le terrain est passablement raboteux. La tête des gerbes est blonde, le pied est veiné du vert des herbes parasites. Ce spectacle, d’une plantureuse moisson nous fait oublier pour un moment la fatigue. Et puis, ne travaillons-nous pas, à notre manière, pour ceux qui luttent là-bas ? Le Canada est le grenier d’abondance de l’Europe.

Deux journées encore de ce labeur qui brise les reins, qui endolorit les doigts sous le gant, et toutes les gerbes seront dressées. Ensuite, la grande affaire du battage viendra nous harceler, avec les incompréhensibles décisions de l’entrepreneur, chargé de cette opération.

Cette année, je crois que nous avons des chances d’éviter le gros travail qu’exige la construction des meules de gerbes. Nous sommes à la mi-septembre, la neige n’est pas encore à redouter. Si la tournée commence à l’Ouest de la paroisse et que, tout à coup, l’itinéraire ne soit pas changé, tout ira bien. Mais si le battage commence à l’Est, nous mettrons en meulons, car il ne faudrait pas compter sur la machine avant la fin octobre ; et, octobre, c’est la tempête de neige possible, et la récolte serait en partie perdue si elle était en plein champ.

Mourier est de mon avis. Je prends de plus en plus l’habitude de l’obliger à prendre les responsabilités. C’est un dérivatif à ses autres préoc-