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COMME JADIS…

— On sera pas bâdrants, promettent-ils en se groupant, tous les six, comme ils peuvent, dans les deux coins, entre les banquettes.

— C’est pas des méchants enfants, affirme sa mère, on sait ben, c’est la première fois qu’ils montent dans les chars… C’est-à-dire, mon Hormisdas est né en bas de Québec, mais il était bien petit quand on est venu dans l’Ouest…

La connaissance est aussitôt faite. J’entends une histoire de colonisation qui ressemble à celle de Lavernes, à celle de chaque paroisse.

Les temps durs sont passés, on commence à voir clair devant soi — au propre et au figuré, — car le bois recule, fait place aux moissons.

— Sans Zilda, j’aurais ben souvent été découragé, fait « son père ». Une femme de même, une « pochée de fleur » pour les « infants », faut pas en demander de plus au bon Dieu.

Zilda a rougi sous le compliment :

— N’allez pas croire « mon vieux » surtout… J’ai « braillé » souvent, les soirs, en pensant à la belle place qu’on avait laissée pour s’en venir dans ce bout-ci…

— Ah ! sûrement, qu’on « en a arraché », nous deux… C’est derrière nous maintenant. À c’-t’heure, le quart de section est « prové ». On ne doit plus rien sur les machineries. Si y a pas de malchance, on se bâtira en « frame » cet automne. Voyez-vous, Mademoiselle Lavernes, — je lui avais