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Est-ce à dire qu’on ne fasse rien pour la foule ? Loin de là. Chaque jour, la presse la réconforte d’articles héroïques. On écrit le « Kanon » par un K. On déclare que le grand dommage du tir de nuit, c’est d’interrompre les beaux rêves. On fait état d’un coup tombé dans un poulailler, et l’on plaint gentiment le coq, veuf de ses huit poules. Et l’on va jusqu’à condamner la descente à la cave, où guette la pneumonie, plus dangereuse que la bombe.

Mon fils, qui ne parle jamais de la guerre dans ses lettres, s’inquiète pour nous : « Le bombardement de Paris m’émeut plus que celui du front, écrit-il. Car au front, on fait une si folle dépense de projectiles, qu’en somme l’obus qui tue est l’exception, l’oiseau rare. Un sur mille. Tandis que, sur Paris, je pense que chaque coup fait des victimes.

18 avril 1918

Exécution de Bolo. La foule paraît soulagée. Après avoir excité sa haine — sans la Presse, que saurait-on d’un Bolo ? — on la satisfait.