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Ganville, 9 août 1917.

Une lettre m’arrive, frappée du timbre « Ouverte par l’autorité militaire. » La dictature qui nous opprime est servie par la résignation générale, par la plasticité imprévue de la créature. On s’est plié sans révolte au contrôle postal. On a accepté que les lettres fussent ouvertes — les lettres où l’on vainc ses pudeurs plus que dans les paroles, les lettres à qui l’on confie les cris de sa tendresse et l’intimité de son cœur, les lettres parfois si chaudes, si frémissantes, qu’elles semblent un fragment de notre propre vie arraché de nous-même, comme un feuillet d’un bloc-notes. Et ouvertes par qui ? Par des fonctionnaires improvisés, que nous coudoyons, que nous connaissons peut-être et qui seraient surhumains si, tout en accomplissant leur besogne, ils ne satisfaisaient pas leur curiosité.

Ganville, 13 août 1917.

Encore un coup de surprise. Le parti travail-