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grands cils et des longues paupières, ses yeux, spirituels et doux, passaient du gris au bleu, comme la mer normande. Ses cheveux, couleur de blé mûr, étaient changeants aussi : selon la lumière, elle semblait blonde ou brune. Leurs torsades ondées, presque crêpées, caressaient l’ovale classique, le cou de colombe, et se répandaient sur ses épaules. Elle avait les sourcils très fournis et bien arqués, le nez tombant mais d’un ferme dessin, la lèvre fraîche et pleine, le menton accentué, curieusement fendu en deux lobes par un sillon vertical, comme une pêche.

À cette époque, elle était encore pensionnaire à l’Abbaye de la Sainte-Trinité, qu’on appelait aussi l’Abbaye-aux-Dames, à Caen. Elle ne portait pas le costume des religieuses de la communauté, le vêtement noir relevé de la guimpe et du bandeau blancs. Bien que sa robe bleue d’uniforme fût d’une simplicité quasi monastique, elle dégageait ses grâces naturelles : un air de modestie grave et douce, une ligne fière, une démarche harmonieuse, de belles mains effilées.

Mesurée, claire, élégante et précise, sa voix lui ressemblait. Et cependant elle surprenait, tellement elle était musicale, d’une pureté