Page:Michel Corday - Charlotte Corday, 1929.djvu/165

Cette page a été validée par deux contributeurs.

fumées des brûle-parfums et des flambeaux, au sommet d’une estrade de douze mètres, tendue aux trois couleurs, le corps de Marat était étendu sous une draperie. Son bras droit retombait. Sa main tenait une plume de fer, comme s’il allait encore « écrire pour le bonheur du peuple ». Le peignoir ensanglanté, la baignoire où il avait péri, encadraient le lit funèbre. Toute la journée, la foule défila, gémissant de tristesse, criant vengeance et jetant des fleurs.

Vers cinq heures du soir, le corps fut hissé sur un char à gradins, traîné par douze hommes, entouré de jeunes filles en blanc, des branches de cyprès à la main. Derrière lui, marchaient la Convention tout entière, les sections en armes, les sociétés populaires, les délégations provinciales. Des musiques militaires, aux tambours voilés de crêpe, jouaient des marches funèbres. La foule chantait des hymnes révolutionnaires. Tous les cinq minutes, le canon tonnait.

Il était près de minuit quand le cortège sans fin, après avoir parcouru une partie de Paris, revint aux jardins des Cordeliers. Là, se dressait le tombeau de Marat, une grotte de granit, close d’une grille. C’était le symbole de sa