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sur ses épaules son fichu rose. Au moment où on allait lui attacher les mains derrière le dos, elle demanda encore de mettre ses gants. Ses gardes l’avaient serrée si fort chez Marat qu’elle portait des cicatrices au poignet. Mais Sanson l’assura qu’il la lierait sans la blesser. Elle sourit : « C’est vrai. Ces gens-là n’avaient pas comme vous l’habitude. »

La rude toilette de la mort, « qui conduit, dit-elle, à l’immortalité », était achevée. Il était plus de six heures. La charrette attendait dans la cour. Charlotte voulut rester debout, appuyée aux ridelles. Sanson laissa cependant près d’elle un tabouret où elle pouvait poser un genou.

La foule s’écrasait autour du Palais. Aux habitués de la guillotine, aux furies populaires, s’ajoutaient les innombrables fanatiques de Marat. À la vue de la condamnée, un formidable cri de mort jaillit de cette multitude. Ce n’étaient, autour de la charrette, que poings tendus, visages forcenés, bouches grandes ouvertes…

À ce moment, un orage, qui couvait depuis le matin, éclata. Mais la pluie ne dispersa pas la foule, dont la clameur couvrait les grondements du tonnerre.