Page:Michel - La misère.pdf/746

Cette page n’a pas encore été corrigée
746
LA MISÈRE

746

Le père vérifia, une fois encore, la fermeture des cachots qui contenaient les deux femmes, et Grenuche lava avec de l’eau fraîche le coup d’assommoir qu’il avait reçu de Jean-Étienne et changea de vêtements, prenant son temps pour tous ces soins, comme il le prenait pour décider de la fin de ses prisonniers. Ce que savait Davys-Roth, c’est qu’ils ne sortiraient pas I tel était intérêt de l’Église la persuasion où il était qu’ils ne pourraient désormais nuire à la foi catholique lui servait de conscience.. Quoique Jean-Étienne parût complètement mort, Davys-Roth n’en ferma pas moins soigneusement le compartiment où il était étendu, puis il s’assit et réfléchit. Bientôt, alourdi par le coup qu’il avait reçu, il s’endormit profondément. Lorsque l’homme des bois, surpris dans sa retraite par le chasseur, se frappe la poitrine de ses poings énormes, jetant le rauque rugissement qui fait trembler la forêt, il éprouve, devant ceux qui l’assiègent, la fauve détermination qu’avait prise Days-Roth devant le progrès ; c’est ainsi qu’il le combattait. XCIII UN GRAND CRIMINEL Devant la tournure que prenait la seconde affaire Rousserand, les principaux. criminels glissant dans les mains de la justice, et, de plus, toutes les ramifications du procès pouvant aboutir à quelque incident fâcheux pour lui, M. X… résolut d’en terminer, une fois pour toutes, avec ce cauchemar. Mais, au moment où il voulait prendre le taureau par les cornes, une complication surgit encore, qui rendit les cornes démesurément longues. Au lieu de l’affaire Sansblair, qui était fort claire, et comportait un bon trio de criminels nº 1, Sansblair, son complice Auguste Brodard, et le domestique, ✰ se trouva réduit au domestique seulement. M. X… se plaignait de la disette d’accusés, succédant à cette belle collection. Que devint-il quand il lui tomba des accusés de tous les points de l’horizon ; devant tous, c’étaient eux qui avaient délivré Auguste. Quoique ne se liant pas directement à l’assassinat Rousserand, l’affaire en faisait partie. Les petits drôles avaient été pris d’un grand coup de filet, dans les fortifications de Saint-Ouen, où ils couchaient, comme le dit la chanson : Les uns avec leur dame et les autres tout seuls ! >> Ils n’apportèrent pas facilement des éclaircissements au procès. Les principaux de cette rafle étaient Chiffard, son second Réné, dit Fanfreluche, et la maîtresse de ce dernier, Antoinette, dite la Mousseline. L’agent Sol (le Villon du bagne) était au secret. Quant à Brodard père, c’est-à-dire à Lesorne, le préfet de police, trouvant bon