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le chemin d’exil. C’est Hector lui-même qui, dans un songe, a conseillé au héros de s’enfuir, car les dieux, et les hommes n’ont plus rien a faire pour Priam et pour la patrie. Énée a perdu tous ses amis, deseruere omries defessi. Après avoir noblement rempli ses devoirs de héros et de citoyen, il lui reste à remplir les devoirs de père, de fils et d’époux. Il vole au palais d’Anchise, qui renferme tout ce que les dieux lui permettent de sauver, une femme, un enfant, un vieillard. Un astre inconnu descend du ciel, brille un moment sur les toits du palais, et se dirige vers l’Ida, comme une lumière miraculeuse qui doit les conduire à travers les ténèbres de la nuit. Voyez cette famille désolée qui s’éloigne avec ses dieux domestiques, suivons des yeux le pieux Énée couvert de la peau d’un lion, portant son père sur ses épaules, tenant par la main le jeune Ascagne qui s’avance à pas inégaux, non passibus æquis ; derrière eux, Creuse marche en silence. Ces illustres fugitifs choisissent les sentiers déserts. Agités de secrètes alarmes, nous tremblons, comme Énée, au moindre vent, au moindre bruit ; nous tremblons pour son précieux fardeau et pour le faible enfant qui l’accompagne, comiti onerique tmentem. On ne se sent rassuré que lorsqu’ils ont franchi les portes et qu’on les voit s’arrêter sous l’antique cyprès qui ombrage le temple de Cérès.

En relisant ce récit dans le poète latin, n’y trouvez-vous pas tout ce qui peut émouvoir les nobles