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Un laurier croissait dans la cour du palais, couvrant de son feuillage les autels domestiques. C’est là que s’était réfugiée Hécubes avec les enfans qui lui restaient ; elle avait retenu à ses côtés le vieux Priam qui, malgré le poids des ans, voulait armer ses mains débiles du glaive des combats. Cette royale famille implorait les dieux protecteurs de Troie, lorsqu’un dernier fils de Priam, poursuivi par Pyrrhus cherche un asile auprès de l’autel, et tombe, percé de coups aux pieds de sa mère. Alors Priam ne peut se contenir « Toi ; s’écrie-t-il, qui verses mon propre sang en ma présence, tu serais le fils d’Achille ; non, Achille ne fut point ton père, car le meurtrier d’Hector ne me vit point sans pitié à ses genoux. » En achevant ces mots, il lance un faible trait, telum imbelle, qui effleure à peine le bouclier de Pyrrhus. Une famille en pleurs, la majesté d’un roi, la vieillesse vénérable, ne peuvent désarmer un vainqueur farouche, et le potentat de l’Asie, celui qui régnait sur tant de peuples et de pays, n’est plus qu’un grand débris étendu sur la poussière, une tête séparée du corps, un cadavre sans nom, sine nomine corpus. Le malheureux monarque avait prédit lui-même sa déplorable destinée, lorsqu’il pressait Hector de rentrer dans les murs de Troie. « Quand j’aurai perdu tous mes enfans, quand tous les maux de cette vie m’auront accablé, un soldat impie viendra plonger le fer dans mon sein, et les