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d’Homère dans la description des lieux ; ses peintures du cœur humain n’ont pas moins de vérité, et nous les sentons mieux ; il faut avoir vu les pays qu’a décrits le poète, pour apprécier la fidélité de ses couleurs ; mais on n’a pas besoin de venir si loin, pour sentir ce qu’il nous dit de la tendresse, de la douleur et de tout ce qui fait battre le cœur de l’homme. En quelque lieu que nous soyons, nous avons en nous-mêmes tout ce qu’il faut pour juger un tableau de mœurs et pour reconnaître l’exactitude de la poésie ou de la peinture dans tout ce qu’elles nous représentent des passions de l’humanité et des scènes diverses de la vie humaine.

Nous étions fort animés de notre lecture, et la chaleur que nous y mettions n’a pas tardé à nous attirer des spectateurs ; un petit garçon turc arrivant avec la foule, s’est approché de nous, et je l’aurais pris volontiers, avec son costume oriental, pour le jeune Astianax. J’allais l’embrasser, lorsqu’une vieille femme musulmane est accourue en criant de toute sa force : Giaour, Giaour ; il n’y avait pas moyen de la prendre pour Andromaque. En même temps des cigognes assemblées dans le cimetière voisin, faisaient entendre leur chant semblable au bruit de deux cailloux qu’on frappe l’un contre l’autre ; cette musique formait un singulier contraste avec l’harmonie des vers d’Homère.

Je crois que M. Poujoulat et moi nous étions les