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nos regards. Beaucoup de marbres de la nouvelle Ilion sont répandus dans des cimetières et servent d’ornemens aux sépulcres. Il n’est pas un paysan musulman de ces contrées qui, après sa mort, ne repose sous quelques précieux débris de l’antiquité. Des fouilles faites par les gens du pays, les tremblemens de terre et les pluies ont quelquefois mis à découvert des bas-reliefs et des médailles où les noms d’Hector et d’Enée se trouvent mêlés à ceux d’un prince d’Asie ou d’un empereur romain.

Le pays, qui s’étend maintenant sous nos yeux, resta long-temps désert après la destruction de Troie ; les solitudes d’Ilion, toujours fidèles au culte de Minerve, n’avaient guères pour habitans que des barbares nomades. Les Éoliens établis à Lesbos et quelques peuples de la Thrace y laissaient des colonies passagères ; enfin, sur la foi des oracles, les Antipaléens se fixèrent sur le territoire de la nouvelle Ilion, qui ne fut bâtie que plusieurs siècles après la vieille cité. Les anciennes traditions de la guerre de Troie subsistaient encore, mais on ne savait plus à quel lieu ou à quel peuple devaient se rattacher des souvenirs vagues, et confus. Au milieu de ces traditions incertaines, une cité nouvelle se déclara la ville de Minerve ; elle usurpa, sans contestation, les privilèges, le nom et la gloire de laïcité de Priam. Le patriotisme jaloux des habitans ne permit pas même qu’il subsistât sur l’emplacement de la première cité des ruines qui