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taient sans doute dans la rade abritée par un grand plateau. Les vagues viennent se briser sur des colonnes de granit, couchées dans les sables de la rive au milieu des algues marines et d’un vaste amas de coquillages.

Tel est l’état présent d’Alexandria Troas ; le désert a pris la place de la cité, des chênes croissent sur les débris des temples et des palais et les chacal, les loups et les renards ont envahi cette antique demeure de l’homme. Quelqu’un qui traverserait la forêt sans connaître les choses des temps passés, ne se douterait point que la s’élevait jadis une ville, car c’est à peine si on trouve quelques traces du peuple qui dort sous le gazon de ces collines, et le jour n’est pas loin où le voyageur pourra dire aussi d’Alexandria Troas : Etiam periere ruinæ, les ruines ont péri.

Vous savez que, depuis plusieurs siècles, les ruines de cette ville ont été pour les Turcs comme une carrière inépuisable. Il n’est pas un monument à Constantinople et sur les bords de l’Hellespont, qui n’ait eu sa part des dépouilles d’Alexandrie. La mosquée d’Achmet, la plus belle de Stamboul, a été construite presque tout entière avec des pierres ou des colonnes de la cité. Au milieu de ce bouleversement successif, les voyageurs n’ont jamais pu retrouver, à différens intervalles, les mêmes monumens, les mêmes débris ; la destruction prenait à chaque époque une autre face, et le spectacle des