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conduire la femme chez l’aga. Après avoir fait de vains efforts pour apaiser la colère de nos hôtes, nous avons regagné notre navire et nous n’avons pu savoir ce qui s’était passé et quelle rumeur avait troublé le village d’Érisso.

À dix heures du soir, et par la nuit la plus obscure, nous entendons des cris sur le rivage ; quatre matelots s’arment de fusils et vont à terre : peu de temps après, nous voyons entrer dans l’Erminio une femme voilée et vêtue à la turque, tenant un enfant dans ses bras ; elle avait échappé aux poursuites dirigées contre elle, et venait demande un asile dans un navire chrétien. Tout le monde était impatient d’apprendre son histoire. Nous n’avions qu’un assez mauvais interprète, et tout ce que nous avons pu comprendre à ce que nous disait la pauvre Lesbienne, , c’est qu’elle avait été mariée à un Turc dès l’âge de treize ans ; qu’on l’avait forcée d’abjurer la religion grecque, et que son mari était officier de la garnison de Baba. On pouvait conclure de cela que a belle fugitive s’était, dégoûtée de Mahomet et de son mari, et qu’elle voulait redevenir chrétienne, à peu près comme madame de la Suse se fit catholique, pour ne plus voir son mari ni dans ce monde ni dans l’autre. Nous nous intéressions tous au sort de la pauvre femme : on nous disait qu’en pareil cas, il n’y allait de rien moins que de la vie, et qu’elle pouvait être jetée à la mer, cousue dans-un sac de cuir. La loi turque