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bles milices, ces milices invisibles à la garde des avenues de l’Orient. En proie à cette multitude d’ennemis, j’ai vingt fois essayé de poursuivre ma relation ; toujours la plume m’est tombée des mains. Peut-être même cette excessive ardeur du climat, et les incommodités qu’elle apporté avec elle, ont-elles contribué à rembrunir mes tableaux ! Triste condition du voyageur, dont les jugemens dépendent de la piqûre d’un insecte, et qui voit tout en noir ou couleur de rose selon que le vent souffle du nord ou du midi Mais enfin l’Imbat est revenu ; avec lui reviendront mes forces, ma bonne humeur et les couleurs impartiales de la vérité ; je reprends la plume, et je vais achever ma description de Smyrne.

Commençons d’abord par les Européens ; les mœurs des Francs de Smyrne méritent d’ailleurs une place à part dans mon tableau. Ils ne sont point gouvernés par les lois du pays ; ils ont des priviléges que les Turcs respectent ; la police n’a pas même le droit de faire chez eux des visites domiciliaires. Il n’est pas de pays au monde où les Européens jouissent de plus de liberté qu’en Turquie ; je n’en excepte pas m~me ceux qui appartiennent à des gouvernemens représentatifs. L’Europe civilisée pourrait reconnaître parmi les Francs de l’Ionie plusieurs de ses usages, quelquefois même ses modes, ses plaisirs et ses fêtes ; nous n’entendons parler que des bals qu’on a donnés l’hi-