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bandonnèrent point le projet de conquérir la Morée ; ils restèrent long-temps les maîtres de plusieurs places maritimes de la Grèce ; mais ils ne portèrent dans leurs entreprises ni l’amour de l’humanité, ni l’envie de délivrer un peuple esclave : ils n’eurent que la pensée de s’enrichir, par le commerce et cette pensée, qui dirigeait toute leur politique, rendit leur domination presque aussi odieuse que celle des Turcs.

J’ai rempli ma tâche ; car je n’avais d’autre but dans cette lettre que de vous faire connaître la Grèce du moyen-âge, la Grèce telle que l’avaient faite l’esprit de la féodalité et l’esprit des Croisades. Si j’avais pu parcourir le Péloponnèse, avec quels soins j’aurais recherché tout ce qui peut nous reporter au temps des chevaliers champenois. Je vous aurais montré ces murailles autrefois si redoutables, que le lierre dérobe aujourd’hui à la vue, ces fossés à moitié comblés, ces tours avec leurs créneaux brunis par le temps. Ces nefs aux formes austères, qui ont retenti des chants de l’Église latine ; ces tombeaux avec le nom et l’épitaphe de nos vieux Francs, les restes de ces manoirs où la chevalerie célébrait ses fêtes, toutes ces images de la religion et de la gloire auraient animé mes récits. Je regretterai longtemps de n’avoir pas visité toutes ces ruines qui sont comme des pages dispersées de nos propres annales ; mais je me console en songeant que ce que je n’ai pu faire, d’autres le feront,