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qui a pour titre le Passe-dix, qui attira sur lui l’attention de l’académie de peinture de Berlin. Cette société le chargea des figures de son almanach, qui n’avait été jusque-là que médiocrement recherché. Les gravures pleines d’esprit de Chodowiecki lui donnèrent une vogue extraordinaire. Il grava, pendant la guerre de sept ans, différents sujets qui y avaient rapport, et, entre autres, les Prisonniers russes à Berlin, secourus par les habitants : c’est une de ses gravures les plus rares. Il parut à peu près dans le même temps, à Paris, une estampe intitulée la Malheureuse famille de Calas. Ce fut dans cette production médiocre que Chodowieki prit l’idée de ses Adieux de Calas ; il choisit le moment ou le père quitte ses enfants pour être conduit à la place de l’exécution. Cette scène, vraiment déchirante, était rendue avec tant d’ame et d’expression, que Chodowiceki, qui l’avait peinte en détrempe, la grava à la pointe sèche, à la sollicitation de toutes les personnes qui avaient vu son tableau. Cette gravure, terminée en 1767, ne parut que l’année suivante. Les épreuves qui portent la date de 1767 sont très-recherchées, parce qu’il n’en fut tiré que cent. il avait peint quelques années auparavant la Passion de Jésus-Christ, en 12 parties ; ce n’était qu’une miniature, mais elle était d’un fini si précieux, et en même temps d’une énergie si admirable, que tout le monde avait voulu la voir et en connaître l’auteur. Chodowiecki eut dès lors beaucoup d’occupation ; il fut même obligé de renoncer à la peinture, pour donner tout son temps à la composition des dessins et des gravures qu’on lui demandait de toutes parts. Presque toutes les estampes qui enrichissent le grand ouvrage de Lavater sur la physiognomonie ont été faites sur ses dessins ; il en a même gravé plusieurs avec une perfection inimitable. On retrouve le même esprit de composition dans les estampes dont il a enrichi les ouvrages de Basedow et l’Almanach de Gotha. Sa réputation s’accrut au point que tous les libraires voulaient avoir des gravures de sa composition pour en orner les ouvrages qu’ils publiaient, et il ne paraissait pas un livre en Prusse qui n’eût au moins un frontispice gravé par Chodowiecki. Il avait fait une étude particulière de l’histoire, et il a donné à chaque personnage le costume du temps et du pays on il a vécu. Son œuvre se compose de plus de 5,000 pièces. Il a beaucoup travaillé pour l’Arioste, Gesner, et le roman de Don Quichotte ; pour la Messiade de Klopstock ; quelques comédies de Lessing lui ont aussi fourni le sujet de charmantes compositions. Il semblait faire avec son burin l’extrait de tous les livres qu’il lisait. Les contrastes qui renouvellent nos pensées semblent aussi renouveler ses compositions ; tantôt malin ou pathétique, il persifle avec Voltaire, ou conspire avec Shakspeare ; il dessine avec le crayon de la Bruyère, ou burine avec l’énergie de Tacite ; il rit avec la Fontaine, ou épie avec Lavater les secrets de la physionomie. On a dit qu’il fut l’Hogarth de l’Allemagne ; il n’aimait pourtant pas qu’on lui donnât ce nom ; moins bizarre dans ses compositions que l’artiste anglais, il est aussi original. Avec des qualités si

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remarquables, on ne doit pas s’étonner de l’empressement des amateurs à rechercher les ouvrages de Chodowiecki. Plusieurs se sont attachés à compléter son œuvre, et leurs efforts ont été plus ou moins heureux. Par une bizarrerie qui n’est pas sans exemple parmi les artistes, il se plaisait à faire quelque changement à ses ouvrages quand il en avait tiré un petit nombre ; de sorte que toutes les épreuves d’une estampe ne sont jamais les mêmes, et que, pour avoir son œuvre complète. il faut se procurer, pour ainsi dire, l’œuvre complète de chacune de ses gravures. On trouve le catalogue de ses ouvrages dans le Dictionnaire des artistes du baron de Heinecken, dans les Miscellaneen artistischen Inhalts de Meusel, t. Ier, n° 131 ; dans le Manuel des amateurs de l’art, par M. Hubert, école allemande, t. 1er, p. 165. Cet artiste est mort à Berlin en 1801, étant directeur de l’académie des arts et des sciences mécaniques de cette ville. A-s.


CHOFFARD (Pierre-Philippe), dessinateur et graveur, naquit à Paris, en 1750, d’une famille peu fortunée. Resté orphelin à l’âge de dix ans, il fut placé, d’après les dispositions qu’il manifestait pour la gravure, chez Dheulland, graveur de plans ; mais bientôt, trouvant ce genre trop borné, il s’essaya à composer d’abord les cartouches et les ornements qui décorent ordinairement les cartes de géographie, et ensuite les vignettes et les culs de lampe qui ornent les belles éditions. Il se livra avec une telle ardeur à l’étude du dessin, que bientôt il entreprit et exécuta, d’après les gouaches de Beaudouin, deux estampes qui obtinrent le plus grand succès. Si nous jugeons Choffard comme compositeur, nous le regarderons, en quelque sorte, comme le créateur d’un nouveau genre. Rien de plus ingénieux que les culs de lampe qu’il a composés pour les Contes de la Fontaine, ainsi que ceux de l’Histoire de la maison de Bourbon, des Métamorphose d’Ovide, et les vignettes d’un ouvrage du prince de Ligne, intitulé : les Préjugés militaires, dans lesquelles il a représenté, sur un très-petit espace, un champ vaste, riche, des scènes piquantes et pittoresques. Si nous considérons Choffard comme graveur, nous n’aurons pas moins d’éloges à lui donner : sa pointe fine et spirituelle animait tout ce qu’elle traçait. Si l’on a un reproche à lui faire, ce serait peut-être d’avoir mis souvent trop de goût dans ses productions, ce qui détruisait le large qu’on aurait aimé à y rencontrer. Cet artiste est mort à Paris, le 7 mars 1809, regretté autant par ses qualités morales que par ses talents. Il a laissé une Notice historique sur l’art de la gravure, Paris, 1805, in-8°, qui a été reproduite en 1809 avec le Dictionnaire des Graveurs (voy. Basan), et dans laquelle ou rencontre des remarques utiles et des observations judicieuses. Le rédacteur de cet article a donné sur Choffard une notice plus étendue dans l’Annuaire de la société des arts graphiques. P-e.


CHOFFIN (David-Étienne), philologue, était né le 2 octobre 1705 à Héricourt, dans la Franche-Comté. Fils d’un négociant aisé, il termina ses études à Stuttgard, et, à sa sortie du gymnase, se char-