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« qu’elle tient de la piété des rois vos prédécesseurs ; elle n’a pas jugé à propos de solliciter la permission du saint-siège, pour vous prier d’accepter, à titre de don gratuit, la somme de 1,500,000 liv. » En 1552, Henri II, sur le point de marcher au secours des protestants d’Allemagne, confia au cardinal de Bourbon le gouvernement de Paris et de l’Île-de-France. Il mourut le 17 mars 1556, laissant la réputation d’un prince magnifique et d'un bon Français. D—R—R.


BOURBON (Charles, cardinal de), était le 5e fils de Charles de Bourbon, 4e comte de Vendôme, aïeul de Henri IV. Le cardinal de Bourbon naquit le 22 décembre 1520. Il était archevêque de Rouen, légat d’Avignon, évêque de Beauvais, et en cette qualité pair de France, commandeur de l’ordre du St-Esprit, abbé de plus de dix riches abbayes, entre autres, celles de St-Denis, de St-Germain-des-Prés, de St-Ouen, de Jumiéges, de Corbie, etc. Il ne joue un rôle dans l’histoire que parce qu’il eut la faiblesse de se prêter aux vues de la ligue, qui le proclama un instant roi de France sous le nom de Charles X, au préjudice de Henri IV, son neveu. Proclamé en cette qualité, en 1584, du vivant même de Henri III, il fut reconnu roi, sous le nom de Charles X, par toutes les villes et par toutes les provinces qui suivirent le parti de la ligue c’est-à-dire par la majorité de la France ; et pendant plusieurs années les actes du gouvernement et les arrêts des parlements, notamment de celui de Dijon, étaient rendus au nom de Charles X. À ce titre, il joignit celui de protecteur de la religion en France. Les Guises, n’osant s’emparer encore du trône des Valois, l’avaient choisi pour remplir la transition entre l’usurpation qu’ils méditaient et la mort de Henri III, qui paraissait dès lors assez prochaine, et qui, exténué par la débauche, ne pouvait avoir d’héritiers. En effet, le caractère faible du cardinal de Bourbon le rendait éminemment propre à ce rôle de mannequin royal. À la mort de son frère Antoine de Bourbon, roi de Navarre en 1562, il avait été déclaré chef du conseil du roi Charles IX et conserva cette dignité sous Henri III. On l’appelait à la cour le Bonhomme, surnom trop mérité par la simplicité avec laquelle, méconnaissant ses intérêts et ceux de sa famille, il servit la faction des Guises et les desseins de Philippe II sur la France, en croyant servir la foi catholique. Ce fut dans cette intention qu’a l’âge de soixante et un ans, il se laissa proclamer roi. En cela, il commettait la double faute de se montrer ingrat envers Henri III, qui l’avait toujours traité avec bienveillance, et de compromettre les droits de son neveu le roi de Navarre (depuis Henri IV). Le premier acte de son prétendu règne fut un manifeste qui invitait tous ses sujets à maintenir la couronne dans la branche catholique. Il renonça dès lors aux paisibles habitudes de la vie cléricale : de prélat métamorphosé en cavalier, il paraissait en public avec l’épée, la cuirasse et le chapeau orné de plumes. Enfin, pour que rien ne manquât à la métamorphose, les Guises l’avaient déterminé a épouser la duchesse douairière leur mère. Henri III, trop faible pour résister à la ligue, traita avec elle, et déclara le cardinal héritier présomptif de sa couronne en 1588. La France, dans ce temps d’anarchie, reconnaissait deux rois, Henri III et le cardinal-roi : c’est ainsi qu’on appelait le cardinal de Bourbon. L’année suivante, le roi Valois, pour se soustraire au joug de la ligue, fit assassiner le duc de Guise et le cardinal de Lorraine, et conduire prisonnier au château de Fontenay-le-Comte le cardinal de Bourbon. Le sang des Guises ayant été vengé par le meurtre de Henri III, le duc de Mayenne, devenu chef de la ligue, fit reconnaître roi le vieux prélat, et le parlement de Paris, vendu aux factieux, rendit, le 5 mars 1590, un arrêt qui le déclarait vrai et légitime roi de France. Il parut dans le temps plusieurs écrits pour l’établissement ou la défense des prétendus droits du cardinal à la couronne. Le plus connu est celui qui a pour titre ; Sommaire des raisons qui ont mu les Français à reconnaître Charles X, 1559, in-8o. Les rigueurs de la captivité dissipèrent les illusions du cardinal dg Bourbon ; il écrivit de sa prison a son neveu Henri IV une lettre par laquelle il le reconnaissait pour son souverain. Il mourut deux mois après, le 9 mai 1590, à l’âge de 67 ans : il était le doyen des cardinaux. Il existe des monnaies frappées à son effigie. Le 3 septembre 1591, le parlement de Paris rendit un arrêt par lequel le nom d’un roy qu’il appelèrent Charles X, supposé par la malice du temps au préjudice de la loi salique, fondamentale du royaume, devait être rayé de tous les actes publics où il avait été mis. Le cardinal de Bourbon qui, comme tous les prélats de sa famille, fut assez peu régulier dans ses mœurs, laissa un fils qui eut part aux bienfaits de Henri IV. D—R—R.


BOURBON (Charles, cardinal de Bourbon-Condé, puis cardinal de Vendôme, enfin cardinal de), à la mort du vieux cardinal son grand-oncle, fut le second cardinal de sa famille qui voulut se faire roi à la place de Henri IV ; après la mort de Henri III, il forma le tiers parti, faction qui fut, selon Péréfixe, la plus dangereuse affaire que notre Henri eut jamais à démêler. Il était le 4e fils de Louis Ier de Bourbon, premier prince de Condé. Bien qu’il n’eût pris que l’ordre du sous-diaconat, il était archevêque de Rouen, et succéda à une partie des abbayes de son grand-oncle. Il fut aussi chef des conseils sous Henri III. Une maladie de langueur retint dans son lit le cardinal de Bourbon pendant plus d’une année et le conduisit au tombeau le 30 juillet 1591. Henri IV, en bon parent, ne laissa pas de l’aller voir ; et, le piquant au vif par ses railleries : « Mon cousin, dit-il au moribond, prenez bon courage ; il est vrai que vous n’êtes pas encore roy, mais le serez possible après moi. » Le cardinal de Bourbon avait à peine 54 ans lorsqu’il mourut. Il était éloquent, actif, et ne manquait pas de résolution dans les moments critiques. Versé dans les lettres, il protégeait les savants ; mais sa cupidité et une sordide avarice ternissaient l’éclat de ces qualités ; enfin l’ambition d’être roi fit de ce prélat le compétiteur ridicule du monarque dont il