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22 ION lieu, avec une préface apologétique où elle défend les écrits et la doctrine de celui qu’i-lle nomme son père (I). Le soin que nous avons pris de rassembler, dans une notice impartiale et purement biographique, les diüérents traits qui nous ont paru propres à caractériser l’esprit, e sentiment, a conduite de Montaigne, peut mettre les lecteurs a même d’apprécier ces qualités, comparatifs ement avec l’idée générale qu’on s’en est formée, et avec les jugements qu’on en a portés dans chaque siècle. l’influence de ses écrits, de ses pensées, de son style, l’a fait juger, dans l’opimon commune la plus raisonnable, philosophe sceptique, disposé a induire, de l’observation des vicissitudes et des variations de la raison humaine chez lui-même et les autres, Vincertitude de nos connaissances ; homme naturellement hon et sensible, de mœurs douces et faciles ; gentilhomme vain à la fois et simple, parlant de soi humblement et avec estime ; citoyen honnête, modéré, attaché par raison comme par devoir à son prince et à la religion de ses pères ; ennemi des nouveautés tendant à subvertir l’ordre moral et civil ; écrivain éloquemment énergique et naïf, mais offrant parfois une liberté ou une familiarité d’expression ui montre l’homme né à nu dans le moraliste aussi bien que ciïaîlle philosophe. Mais ses apologistes ou ses critiques, suivant leur esprit et leurs opinions particulières, l’ont jugé chacun diversement, en s’attachant à quelques traits, exagérés ou isolés, pour le louer ou le blarner, au préjudice de l’exactitude ou mèmeddze la bonne foi. Dans ce siècle où l’on se ne philosophie ’, Naigeon, éditeur et annogitzur de Montaigne, oublie la franchise libre de l’écrivain, et en fait un pur déiste (2), en attribuant a des considérations politiques ce que l’auteur dit ouvertement de plus favorable au christianisme, et en lui psètant des sentiments contraires dans des tassages équivoques, détournés de leur véritab sens, et séparés de ce qui les entou ; e) ;)’un aut : re)c6aé, l’auteur drîœClu-istianùau enseigne (3, en réunissant ssages relatits à la religion, ou même traduit ? de la théologie de Sebonde, et en exhumant du journal du gentilhomme voyageur quelques actll Os peut consulter, pour le complément des éditions ; le Jlnarsst dal. Brun•t· Parmi ll édition récentes de Montaigne, nous slgnslesoas seulement : l’l’édition de H. J.-V. L«: lert·, avae les notes de hns las commentateurs, Parts, lefèrre, 18’28-1829,6°ol. in-0° ; Paris, 1%, l ton vol. ind- a 2 colonnes ; 186-IBN 8 vol. tn-lé ; 2- une autre avec lu notes de Coste, NnI|••n. äan· ; ;·Duval, Eloy Johanneau et autres e¤rrimt-ntateurs, Paris. !, 10 vol. in-IS ; 3° Celle qui fait parue de la collection du Pantheon ltttiraira, Paris, lB31, to-at’, avec une notice blogra hl ne de Duchoa. outre les él es et notices sur

?gf’I ; alg ; u h’dans le courant ge cg aigle, en con-Psris,

•1837, in•8 âzditausu pïauooapïas sur lx :] roigae, Parts, 1817. in-8°, et Nouveaux documents, etc., recueillis et publiés par la même, Paris, 1860, in-8° ; Via publiqu de Àloatniguv, par I !. Alphonse Grun, Paris 156, la-8°. til A¢¢·ti-a.ar¢nl en tête deïédition eitea, at inaas6, aauf q>••:2ue :·î~âpprc ; to ; a peu tsnportaatea, daas raanan de Dapper, s• then, sis, tale-.

ION tes d’une piété non exempte de superstition, sans considérer ses écarts, la iiberté de ses propos et les traits de vanité qui accompagnaient ces mêmes actes, en a fait presque un chrétien religieux et dévot. Un autre écrivain déjà cité (I), ne se rappelant pas les derniers moments du bon gentil mme qui, loin de s’isoler de ses proches, s’est entouré de ses amis voisins, lui refuse la sensibilité morale, et le reconnaît toutefois capable du sentiment de l’amitié. Un autre auteur (2) lui accorde, avec raison, la croyance en « Dieu et à la vertu n ; mais on peut croire qu’il entend purement ici la vertu d’Epicuœ, lorsqu’il omet de parler de l’acte dernier de sa vie, qui rattache en définitive cette vertu à la foi chrétienne. Dans. le grand siècle, Pascal (3} a plaudit à Montaigne soumettant la raison superge a l’autorité de la foi ; mais, en reconnaissant qu’il professe la religion ratbolique, il l’oppose à Epictète, en fait un épicurien dans sa conduite comme dans ses écrits, et perd trop de vue le magistrat, le citoyen, l’homme de ien. Balzac (i) loue Montaigne, que h tale branche 15) blâme au contraire d’avoir peint ses mœurs domestiques. ltalebranclie voit surtout dans l’écrivain la hardiesse de l’esprit et de l’imagination, et Balzac, des pensées hasardées et de faux jugements. La Bruyère leur répond à tous deux en observant que Balzac ne pensait pas assez pour goûter un auteur qui pense eauooup, et que Malebranche pensait trop subtilement pour (accommoder de pensées si naturelles. Et certes, celui que Locke et J.-J. Rousseau ont mis à contribution dans ce qu’ils ont écrit de plus raisonnable sur l’Edu¢¢uia» des enfanu n’est pas simplement un auteur donc desprit et d’imagination : l’écrivain qui observe et analyse si bien en lui l’homme dont il est l’historien ne peut être tué de donner carrière à son imagination, parce qu’en peignant l’homme moral, il anime, crée et figure ses expressions, comme l’a fait, à son imitation, le célèbre peintre de portraits la Bruyère. De même, celui qui a si bien connu et jugé les anciens qu’il avait tant cultivés, Lucrèce et Virgile, Salluste et Tacite, Plutarque et Sénèque, Cicéron et Pline, ne saurait être traité de mauvais juge pour avoir mis le.’i• livre de l’Enéid«·. où il était si difficile detre poëte, au-dessus des onze autres livres, jugement partagé jusqu’à un certain point par madame Dacier et Jacques Delille ; pour avoir aussi jugé plus sévèrement qu’il ne convenait à un censeur gentilhomme la philosophie de Cicéron et de Pline, qu’il qualifie « dbstentatrïee et de pajîlière » ; pour avoir encore, dans son jugemen sur les poëtes français, cru voir (avec tout son siècle) revivre en quelque sorte Lucain et sa ill Diaeaara gai a obtenu ma amnxwa, Parts. 1812, la-0°, (2l Diacoan couronné par l’lnsltut, Paris, 1812, in 4°. 13e Pennac, l" part., art. il d’li’f-ctit¢ ai de Jloulaiyae. (4) Duaarliûunentaâad p. 19-2. lb ; llaaanahda la, Ilv. 8, part. i, chap s.