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fertile, et adroit à ménager les passions et les préjugés de ses auditeurs. Platon, au contraire, dans son Ménexème, le traité avec mépris, et s’appuie sur l’autorité de Socrate ; mais il faut observer que Socrate fut souvent attaqué et insulté par les sophistes, particulièrement par Antiphon. Il contribua puissamment à faire abolir la démocratie et à introduire dans Athènes la tyrannie des quatre-cents, l’an 412 avant J.-C. La division s’étant mise, peu de temps après, entre ces nombreux gouvernants dont il faisait partie, au sujet d’Alcibiade, que les uns voulaient rappeler, tandis que d’autres s’y opposaient, Antiphon, qui dirigeait ce dernier parti, alla avec neuf autres Athéniens en ambassade à Lacédémone, pour obtenir la paix à quelque condition que ce fut ; mais il ne put réussir. La tyrannie des quatre-cents ayant fait place à une forme de gouvernement plus populaire, Alcibiade fut rappelé, et Antiphon mis en accusation au sujet de son ambassade. Ce fut dans cette circonstance qu’il prononça, pour sa défense, le beau discours que rappelle Cicéron (in Brut., no 47), et que Thucydide, qui l’avait entendu, cité également avec éloge, ce qui n’empêcha pas qu’il ne fait condamné à mort, comme traître à la patrie. On défendit de lui donner la sépulture ; sa postérité fut déclarée infâme, et sa maison rasée. Il existait de cet orateur soixante discours ou déclamations dont Cæcilius le rhétoricien assurait que vingt-cinq étaient supposées. Il n’en reste maintenant que seize. Ce sont des accusations de meurtre ou des défenses contre des accusations semblables. Quelques écrivains ont douté que ces discours fussent d’Antiphon ; mais Fabricius et d’autres grands critiques pensent qu’il en est véritablement l’auteur. Ils font partie de la collection des auteurs grecs de Reiske, et se trouvent, dans le 7e volume, accompagnés de notes philologiques, et suivis d’une dissertation de van Spaan, et des notes de Hauptmann et de Taylor. Ils ont été publiés également avec des discours d’Eschine, Lysias, etc., par Alde, in-fol., à Rome, en 1515, par Henri Estienne, en 1575, et in-8o, par Miniatus, à Hanau, en 1619. K.


ANTIQUABIO (Jacques), de Pérouse, ainsi appelé de son nom de famille, et non, comme quelques-uns l’ont cru, à cause du goût qu’il put avoir pour les antiquités, fleurit sur la fin du 15e siècle et au commencement du 16e. Après avoir rempli dans sa jeunesse la place de secrétaire auprès du cardinal Savelli, légat à Bologne, il fut appelé par le duc de Milan, Jean Galéas Sforce, pour occuper le même emploi auprès de lui. Ce duc l’employa dans les affaires les plus importantes, et lui accorda les droits de cité à Milan et à Pavie. Louis Sforce, surnommé le Maure, lui conserva sa place. Il resta à Milan après que les Français en eurent fait la conquête, et il paraît qu’il se déclara entièrement pour eux. On le voit par un discours qu’il prononça au nom du peuple de Milan, dans une occasion solennelle, et qui fut imprimé sous ce titre : Oratio Jacobi Antiquarii pro populo Mediolanensi, in die triumphi Ludovixi Galliarum regis et Mediolani ducis de fractis Venetis, Milan, juin 1509), in-4o. Il était prêtre, et obtint de riches bénéfices du pape Alexandre VI. Il se distingua par une grande régularité de mœurs, par son savoir, et par l’appui qu’il prêta en toute occasion aux gens de lettres. Ils l’en récompensèrent par leurs éloges, et par la dédicace qu’ils lui firent d’un grand nombre de leurs ouvrages. Antiquario passa le reste de ses jours à Milan, où il mourut en 1512. On a recueilli, en un volume, ses lettres latines, qui ont été imprimées à Pérouse, 1519, in-4o. On en trouve aussi plusieurs parmi celles d’Ange Politien, et dans d’autres recueils. C’est un auteur peu connu, mais un personnage important dans l’histoire littéraire de son temps. G-é.


ANTIQUUS (Jean), peintre, né à Groningue, le 11 octobre 1702, fut d’abord obligé de peindre sur verre. À l’âge de vingt-trois ans, il voulut s’embarquer pour aller à Paris ; mais il fut forcé de revenir à Amsterdam. Toujours poursuivi par le désir de voyager, malgré les obstacles que lui opposait son indigence, il allait partir pour l’Angleterre avec son frère Lambert, peintre de paysages, lorsqu’ils trouvèrent un vaisseau qui faisait voile pour Gènes, et sur lequel ils s’embarquèrent. Jean Antiquus fit en route le portrait du capitaine, et il fut trouvé si ressemblant qu’on ne voulut rien recevoir des deux artistes pour leur passage. Arrivés à Gènes, les portraits furent encore leur ressource ; et, après cinq mois de séjour, ils se rendirent à Florence et à Livourne. Le grand-duc fit une pension à Jean Antiquus ; et ce peintre ayant été admis à l’académie de Florence exécuta, pour son morceau de réception, une vaste composition représentant la Chute des Géants. Il fit ensuite une copie du Martyrs de St. Étienne, par le Cigoli, et la, rendit 100 ducats. Pendant un séjour de six années à Florence, il fit quatre voyages à Rome. Dans l’un, il reçut l’accueil le plus obligeant et des marques de faveur du pape Benoît XIII. Les artistes lui témoignèrent aussi beaucoup d’estime ; et lorsqu’il alla voir Naples, Solimène, alors a la tête de l’école de cette ville, lui offrit sa maison. De retour a Rome, il était occupé à y faire quelques tableaux, lorsqu’il apprit que le grand-duc, son protecteur, était dangereusement malade. Il courut à Florence ; mais il n’arriva que pour joindre ses regrets à la douleur publique : le prince venait de mourir. Après avoir séjourné dans les principales villes d’Italie, et travaillé à Venise pour le fameux général Schullembourg, Antiquus retourna dans sa patrie. Le long séjour qu’il avait fait en Italie avait donné à ses compatriotes une opinion avantageuse de ses talents ; il la soutint par de beaux portraits et des tableaux d’histoire. Le prince d’orange lui fit alors une pension, et le fixa à Breda. Aussi laborieux qu’étable, Antiquus fit plusieurs grands ouvrages, et entre autres deux plafonds. Il mourut en 1759, âgé de 46 ans. Descamps, qui a fourni ces détails, ajoute que ce peintre était bon dessinateur, peintre facile, bon coloriste, et qu’il avait puisé un goût sage dans l’école de Rome. La France ne possédant aucun ouvrage d’Antiqnus, on doit ici s’en rapporter a l’autorité, d’ailleurs recommandable, de Descamps. D-t.