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mana ex variis authoribus, de oriu, pradibus et discrimina dignitatum civilium et ecclesiasticarum, Anvers, Th. Mertens, 1502, in-8o. Une seconde édition parut à Rome en 1503, in-4o. L. G.


ANTHOINE (Nicolas), fanatique du 17e siècle, naquit à Briey en Lorraine, de parents catholiques. Il étudia successivement à Luxembourg, à Trèves et à Cologne, sous la direction des jésuites. De retour dans sa famille, il se mit en relation avec Paul Ferri (voy. ce nom), ministre protestant à Metz, et il embrassa le calvinisme. Il fut envoyé à Sedan, puis à Genève, pour étudier la théologie. Ayant fait une lecture assidue de l’Ancien Testament, et ne pouvant éclaircir des difficultés qu’il trouvait dans le Nouveau, il prit la résolution de professer le judaïsme. Il retourna à Metz, découvrit son projet aux rabbins de cette ville, et demanda la circoncision. La synagogue l’adressa aux juifs de Venise, qui le renvoyèrent à ceux de Padoue. Là il ne put encore obtenir ce qu’il désirait. Les juifs, craignant de s’attirer de mauvaises affaires, n’osèrent pas l’admettre parmi eux, et lui dirent qu’il lui suffisait d’être bon israélite dans le fond de son cœur, sans professer extérieurement la loi de Moïse. Anthoine revint à Genève, dissimula sa croyance, et fut nommé, par le synode de Bourgogne, ministre à Divonne, dans le pays de Gex. Il prenait toujours pour textes de ses sermons des passages de l’Ancien Testament, ne rapportait à Jésus-Christ aucune des prophéties que les chrétiens lui appliquent, et ne parlait même jamais de lui. Cette conduite fut remarquée par plusieurs personnes, qui conçurent des doutes sur la foi de leur pasteur. Celui-en en fut informé, et la crainte d’être dénoncé le fit tomber en démence. Dans son délire il proférait des imprécations contre Jésus-Christ et l’Évangile. Il offrait de mettre sa main au feu pour prouver la vérité de ce qu’il avançait, et défiait les ministres qui étaient venus le voir d’en faire autant. S’étant échappé pendant la nuit, il arriva aux portes de Genève, dont les magistrats le firent conduire à l’hôpital. Après un traitement convenable, son esprit se calma ; il mit plus de modération dans ses paroles, mais il persista dans son attachement au judaïsme. Tous les efforts pour le ramener à la foi chrétienne furent inutiles. Alors on procéda juridiquement contre lui. Paul Ferri écrivit de Mets une lettre dans laquelle il attribuait les égarements d’Anthoine à une extrême mélancolie ; mais ce malheureux n’en fut pas moins condamné à être étranglé sur un bûcher et ensuite brûlé. En vain les ministres protestants de Genève demandèrent pour lui un sursis aux magistrats ; la sentence, prononcée le 20 avril 1632, fut exécutée le même jour. On trouva parmi les papiers d’Anthoine quelques prières, une profession de, foi judaïque en 12 articles, qu’il avait envoyée au conseil pendant sa détention, un écrit contre la Trinité, une explication de plusieurs passages de l’Ancien Testament, etc. P-rt.


ANTHOINE (Antoine-Ignace), baron de St-Joseph, né le 21 septembre 1749, à Embrun, d’une famille de magistrature, annonça fort jeune un goût décidé pour la voyages et pour les combinaisons commerciales. Il se rendit à Marseille, chez un négociant qui se plut à cultiver en lui d’heureuses dispositions, et bientôt le mit à la tête d’une maison de commerce à Constantinople. Des bénéfices considérables et une prospérité constante ne tardèrent pas à justifier cette confiance. Cependant, doué d’une âme élevée, d’un esprit actif et d’une sagacité rare, le jeune Anthoine ne renferma point ses idées dans le cercle ordinaire du commerce ; il porta ses vues plus loin, et conçut le projet d’ouvrir à sa patrie de nouvelles sources de richesses. Ses mémoires, remis au comte de St-Priest, ambassadeur en Turquie, furent goûtés par le cabinet de Versailles, et le négociant homme d’État reçut l’ordre de visiter la Russie et la Pologne, pour recueillir les renseignements nécessaires au succès des relations qu’il voulait établir, par la mer Noire, avec ces deux contrées. Les années 1781, 1782 et 1783 furent consacrées à cette importante et délicate mission. Catherine II et ses ministres apprécièrent les nombreux avantages que l’empire russe pouvait tirer de ses rapports commerciaux avec la France, et le roi Stanislas en reconnut également l’utilité pour la Pologne. Anthoine obtint de la Russie l’autorisation de fonder à Cherson un établissement dont la prospérité a toujours été en croissant. Si les productions des provinces méridionales de la France ont trouvé de nouveaux débouchés, si les blés de la Crimée sont devenus une ressource inappréciable dans les temps de disette ; enfin si la marine royale reçoit aujourd’hui les bois de haute mature de la Lithuanie en moins de quatre mois au lieu de trois ans, on en est redevable au génie créateur d’Anthoine. Le roi Louis XVI crut devoir, en 1786, récompenser Anthoine par des lettres de noblesse conçues dans les termes les plus flatteurs. Il faut, pour bien apprécier ses services, lire ce qu’en a dit le comte de Ségur dans ses Mémoires. « Ce fut en 1786 que M. d’Anthoine se fixa définitivement à Marseille, où, la même année, il épousa mademoiselle Clary, d’une des familles les plus distinguées de cette ville. Jamais ses propres affaires ne l’empêchèrent de se rendre utile à ses concitoyens : administrateur des hospices et membre du conseil de la ville, il ne cessa de faire le bien : et ses soins actifs et ses avances généreuses contribuèrent beaucoup a préserver Marseille de la famine dont elle était menacée en 1790. » Il n’en reçut pas moins, en 1793, l’ordre de s’éloigner avec sa famille. Gènes lui servit de refuge ; mais aussitôt que la tourmente révolutionnaire eut cessé, il rentra dans ses foyers. Il devint alors membre de la chambre de commerce, député au conseil général de commerce établi près du ministre de l’intérieur en 1803, membre du conseil municipal, candidat au corps législatif, puis au sénat conservateur. Les événements du 18 brumaire semblaient devoir porter Anthoine au comble de la fortune, À raison de son alliance avec la famille Clary ; mais, exempt d’ambition, il redoutait les faveurs que tant d’autres, dans sa position, auraient recherchées