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domicile. Le jeune Athenas annonça dès son enfance un goût décidé pour la chimie. « Issu d’un sacristain de paroisse, disait-il a ce sujet, j’aurais été enfant de chœur, abbé ou moine ; c’est aux alcalins commerciaux qui remplissaient les magasins de mon père, aux soudes et aux potasses qu’il vendait journellement aux blanchisseuses de la rivière des Gobelins, que j’ai dû ma destinée pharmacologique. » Placé au collège des Oratoriens à Soissons, il y fit d’excellentes études, et en sortit en 1768, comblé de prix et d’éloges. Il se livra dès lors à l’étude de la chimie et de la physique, et y parvint bientôt au degré que ces sciences n’avaient point encore dépassé. Admis comme premier aide l’apothicairerie de l’abbaye St-Germain-des-Prés, il augmenta ses connaissances en profitant des leçons et des conseils du directeur (le savant P. Malherbe, qui fut depuis bibliothécaire du tribunat), et il en acquit d’autres en suivant les cours d’anatomie, de physiologie, de minéralogie et de géologie, sous les Buffon et les Daubenton. Il se livrait dans le même temps à des recherches d’antiquités romaines et gauloises ; mais l’archéologie, la botanique rurale et l’économie agricole restèrent ses goûts de prédilection. Vers 1786, Athenas quitta Paris, et vint à Nantes, d’où, peu de temps après, il se rendit au Croisic. Là, sur le bord de la mer, il éleva une fabrique de soude à extraire du sel marin, opération alors inconnue. Il chercha à y joindre la formation de l’acide sulfurique dont il avait besoin, et la décomposition des pyrites locales parut d’abord lui en offrir les moyens ; mais ses recherches n’ayant pu lui en procurer d’assez riches en sulfure, il renonça a sa double entreprise, et revint à Nantes, où il débuta par une teinturerie pour les toiles. Plus tard il créa une distillerie ambulante sur des bateaux tour à tour transportés par les eaux de la Loire, de la Sèvre, de l’Achenau et du lac de Grand-Lieu, sur les diverses rives vinicoles. Une série de mauvaises récoltes nuisit à la durée de l’établissement. Rentré à Nantes, Athenas y fonda, à l’aide d’actionnaires, une grande fabrique d’acide sulfurique au moyen de la combustion du soufre, accélérée par le nitrate de potasse. Mais les orages de la révolution et le manque de matières premières le forcèrent d’abandonner cette usine. Des circonstances imprévues contrariaient toujours ses entreprises ; et c’est à de tels obstacles qu’il faut attribuer la courte existence de son second établissement pour la fabrication de la soude factice dans l’île de Noirmoutiers. Mais déjà les travaux d’Athenas, la variété de ses talents et de ses connaissances lui avaient acquis quelques droits à la confiance de ses nouveaux concitoyens. Appelé, en 1791, à faire partie du corps municipal de Nantes, il fut nommé, en 1795, directeur de la monnaie de cette ville. Il remplit ces fonctions avec autant de zèle que d’intégrité pendant vingt-deux ans, et les cumula longtemps avec celles de secrétaire de la chambre de commerce, qui lui furent confiées, des sa création, en 1803. Il se démit de la première place en 1817 ; mais il a conservé jusqu’à sa mort la seconde, dans l’exercice de laquelle il a fait preuve d’un profond savoir en économie politique et commerciale, et il a été cité comme modèle pour le style clair et précis de sa correspondance. Athenas a été aussi membre du collége général du département de la Loire-Inférieure, du conseil municipal de Nantes et de diverses administrations locales. Partout sa place était marquée au secrétariat, où on le conservait le plus longtemps possible. L’un des fondateurs, en 1797, de l’institut départemental, depuis société des sciences, lettres et arts, et aujourd’hui société académique de Nantes, il en fut toujours un des membres les plus laborieux. Athenas avait parcouru à pied la Bretagne ; il l’avait explorée avec un soin minutieux, sous les rapports physiques et historiques ; personne n’en a mieux connu, mieux décrit les monuments. Mais l’économie politique et rurale, le commerce, l’industrie, furent par dessus tout l’objet de ses recherches ; il professait les principes de la liberté commerciale la mieux entendue ; et c’est à lui principalement que l’agriculture du département de la Loire-inférieure doit les progrès qu’elle a faits depuis vingt-cinq ans. Rien n’arrêtait son zèle pour les découvertes. On lui soumet une pierre informe, mais d’une pesanteur remarquable ; il y reconnaît la présence de l’étain, se rend aussitôt à une quinzaine de lieues, chez le propriétaire du champ dont l’échantillon a été fortuitement enlevé, et la très-riche mine d’étain de Piriac, ses divers filons et leurs gisements sont scrupuleusement examinés et justement appréciés. Bientôt la description exacte qu’en donne Athenas captive la confiance de la direction générale des mines, qui devient propriétaire de cette exploitation. En 1810, il explora les Pyrénées, et trouva, dans les environs de St-Boïs, le soufre natif à extraire de la chaux carbonate bituminifère, que, sur les indications de Gillet de Laumont auquel il laissa tout l’honneur de la découverte, il était allé y chercher, mais dont l’exploitation se trouva trop difficile et trop dispendieuse. Agriculteur habile, et soumettant toujours la brillante théorie à l’expérience positive, il porta ses vues sur les améliorations que réclame encore le plus ancien et le plus utile des arts. On lui doit un grand nombre de mémoires sur diverses parties de l’économie rurale, et l’invention et le perfectionnement de plusieurs instruments aratoires. Il est l’auteur d’une très-puissante charrue connue sous le nom de Défricheur Athenas, qui lui a valu, en 1824, la grande médaille d’or de l’académie des sciences. D’autres prix lui ont été également décernés par des sociétés scientifiques et agronomiques. Ce savant est mort à Nantes, le 22 mars 1829. La chambre de commerce de cette ville a fait à sa veuve une rente viagère de la moitié des honoraires dont il jouissait. Athenas a laissé plusieurs enfants de deux mariages. Ses quatre filles se sont consacrées aux beaux-arts et aux travaux du burin : l’ainée a épousé M. Massard, célèbre graveur. L’agriculture doit à Athenas la naturalisation dans le département de la Loire-inférieure de l’herbe de Guinée (Panicum altissimum), le plus avantageux de tous les fourrages tant pour l’abondance que pour la qualité. Après plus de quinze ans