Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 2.djvu/196

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
191
ARG

naquit le 16 mai 1675 au château du Plessis, paroisse d’Argentré, au diocèse de Rennes. Il se distingua pendant sa licence, fut docteur de Sorbonne en 1700, aumônier du roi en 1709, et le premier a qui l’on conféra gratuitement cette charge, évêque de Tulle en 1723. Ce savant prélat faisait ses délices de l’étude de la théologie, et y employait tous les moments que lui laissaient les fonctions de l’épiscopat, qu’il remplissait fidèlement. On a de lui : 1° des notes latines sur l’Analyse de la Foi de Holden, Paris, 1698. 2° Apologie de l’amour qui nous fait désirer de posséder Dieu seul, par le motif de trouver notre bonheur dans sa connaissance et son amour, avec des remarques sur les maximes et les principes de M, de Fénélon, Amsterdam, 1698, in-8o. 3° Traité de l’Église, Lyon, 1698, 2 vol. in-12. 4° Elementa theologiæ, etc., Paris, 1702, in-4o, suivis, en 1705, d’un Appendix à cet ouvrage, pour s’expliquer sur quelques sentiments particuliers qu’on lui avait reprochés. 5° Lexicon philosophicum, la Haye, 1706, in-4o. 6° De propria ratione qua res supernaturales a rebus naturalibus differunt, Paris, 1707, in-4o. 7° Martini Grandini Opera, Paris, 1710, 6 vol. in-8o, où il inséra plusieurs de ses ouvrages. 8° Collectio judiciorum de novis erroribus, 1725, 1733 et 1736, 5 vol. in-fol. Ce recueil renferme un grand nombre de pièces importantes, curieuses, et dont la plupart n’avaient pas encore été imprimées. 9° Remarques sur la traduction de l’Écriture sainte de Sacy, in-4o. 10° Instruction pastorale sur la juridiction qui appartient à la hiérarchie de l’Église, 1731, in-4o. 11° Dissertation pour expliquer en quel sens on peut dire qu’un jugement de l’Église qui condamne plusieurs propositions de quelque écrit dogmatique est une règle de foi, Tulle, 1733, in-12, supprimée par arrêt du conseil. 12° Plusieurs livres de piété. Ce prélat était sur le point de mettre sous presse : Theologia de divinis litteris expressa, lorsqu’il mourut dans son diocèse, le 27 octobre 1740. T-d.


ARGENTRÉ (Louis-Charles Duplessis d’), évêque de Limoges, né en 1724, fut nommé en 1789 député aux états généraux, et y siégea notamment avec le parti qui s’opposait à la révolution. Les temps de la persécution étant arrivés, il se réunit, à Paris, à l’évêque de Clermont, pour ordonner les ecclésiastiques qui restaient fidèles à leur vocation. Les circonstances le forcèrent a quitter la France ; il se réfugia à Munster, d’où il correspondait avec les grands vicaires auxquels il avait confié l’administration de son diocèse. Le concordat de 1801 lui fit prendre une autre disposition. Il signa d’abord, avec trente-sept autres évêques français, les remontrances qui furent adressées à Pie VII ; mais, craignant un schisme qui serait devenu fatal à l’Église, il fit passer, le 20 février 1802, aux fidèles de son diocèse, un avertissement, avec des instructions pour les vicaires généraux et pour le clergé, où il disait que le nouvel évêque étant entré en fonctions avec l’autorisation du pape, il retirait ses pouvoirs aux vicaires généraux que lui-même avait institués. Par suite de cette décision de l’évêque de Limoge, il n’y eut presque point d’ecclésiastiques dissidents dans ce diocèse, et l’ancien évêque fut constamment en relation avec son successeur. Ce prélat mourut à Munster, en avril 1808. G-y.


ARGENVILLE. Voyez Dezallier.


ARGHOUN, fils d’Holakou, fut choisi Mogol de Perse, d’un commun accord, par tous les grands de l’empire, pour succéder a son oncle Ahmed, nommé aussi Tengdar ; il monta sur le trône de la dynastie Ilkhanyenne régnante à Tauryz, le 27 du mois de djomady 2e, 683 de l’hégire (11 août 1284), suivant le Habyb-al-Seiar de Khondemyr. Aboul-Féda place le même événement au mois de djomady 1er, 682 (août 1283). Fait prisonnier et gardé secrètement par son oncle Abaca-Kan, il ne dut la vie qu’a la haine et au mépris qu’inspirait ce lâche et timide usurpateur. Il avait ordonné de faire périr Arghoun ; mais les officiers chargés de cet ordre profitèrent de l’absence d’Abaca pour rendre la liberté au prisonnier. Celui-ci eut bientôt réuni un gros de mécontents. Il se mit à la poursuite de l’usurpateur, le prit, et fut aussitôt salué empereur par toute l’armée. Arghoun signala son avènement par un acte de perfidie atroce bien digne d’un Mogol. Le président du divan, sous le règne précédent, avait cru devoir se soustraire par la fuite au ressentiment du nouveau monarque. Il avait passé d’Ispahan à Chyraz, et de la à Hormouz (Ormus), dans l’intention de s’embarquer pour l’Inde, lorsque les protestations les plus rassurantes d’Arghoun l’engagèrent à revenir sur ses pas. Il fut mis à mort le 4 chaaban de la même année. Les immenses biens qu’il possédait dans l’Irak et dans l’Azerbaïdjan furent confisqués au profit du trésor impérial. Un Mogol, nommé Bouca, succéda au proscrit dans la place de président du conseil, et subjugua son faible souverain, au point d’être bientôt déclaré premier ministre et d’exercer réellement l’autorité suprême. Il reçut de son maître le titre de djenksenek (l’invincible), et, parmi un grand nombre de prérogatives, celles de commettre impunément neuf fois le même crime et de n’avoir jamais d’autre juge que le monarque. « Enfin, dit Khondemyr, Arghoun ne garda que le titre de roi. » Bouca se conduisit envers le peuple avec une équité vraiment remarquable. Les honneurs dont il était environné et l’absolu pouvoir l’enivra au point qu’il aspira à la couronne, et forma le projet de renverser son bienfaiteur pour occuper sa place. Peut-être aussi la jalousie des grands et les intrigues d’un médecin juif, autrefois crieur public et nommé Saad ed Daulah contribuèrent-elles à la chute de ce favori. Au reste, il fut livré par ses propres officiers et périt en l’an 690. Sa chute entraîna la perte de tous ses parents et de ceux qui avaient suivi sa fortune. Il eut pour successeur dans sa place, et surtout dans la faveur du souverain, ce juif dont nous venons de parler ; les soins qu’il donna à Arghoun dans une maladie assez grave assurèrent sa fortune ; mais il ne devait pas s’attendre à un sort plus heureux que celui du favori qu’il avait renversé et supplanté. Aussitôt après son élévation, il distribua les gouvernements de Bagdad,