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son crime, il les mit dans l’impossibilité de reculer. Il parvint par leur moyen, et avec le secours des esclaves à qui il avait promis la liberté, à s’emparer du pouvoir, et se livra alors à toute sa cruauté. Apollodore prit pour gardes des Gaulois accoutumés aux meurtres et au pillage, pour ministre un certain Calliphon, qui avait été un des agents d’Agathoclés, tyran de Syracuse, et il fit mourir tous ceux dont les biens pouvaient tenter sa cupidité. Il ne s’en tint pas là : voir couler le sang était pour lui un bonheur, surtout lorsqu’il était ivre, ce qui lui arrivait souvent, et il fit égorger des citoyens uniquement pour se repaître de cet horrible spectacle. Il fut enfin détrône par Antigone Gonatas, et on le fit mourir en le jetant dans une chaudière d’eau bouillante, après l’avoir écorché vif, et avoir fait brûler ses deux filles sous ses yeux. C-r.


APOLLODORE, fils d’Asclépiade, et célèbre grammairien d’Athènes, vivait vers l’an 150 avant J.-C. Il étudia la philosophie sous Panætius, et la grammaire sous le célèbre Aristarque. On comprenait alors sous le nom de grammaire tout ce qui tenait à l’explication des poètes, comme l’histoire, la géographie, etc. Apollodore s’acquit une telle réputation en ce genre, que les amphictyons lui décernèrent des honneurs publics. Il avait écrit un grand nombre d’ouvrages, dont les principaux étaient un traité sur les dieux, en 20 livres au moins ; un commentaire sur le catalogue des vaisseaux d’Homère, et une chronique en vers ïambiques. Il nous reste sous son nom un ouvrage intitulé Bibliothèque, qui contient l’histoire des dieux et l’histoire héroïque, jusqu’au retour des Héraclides dans le Péloponèse ; mais il est aisé de voir que cet ouvrage n’est pas du célèbre grammairien d’Athènes, et qu’il n’est qu’un abrégé extrait probablement des livres dont nous avons parlé. Ce n’en est pas moins un ouvrage très-important pour l’histoire héroïque et la mythologie. La première édition est celle qu’Æginus Spoletinus en a donnée avec sa traduction latine et des notes, Rome, 1550, in-8o. Les meilleures sont celles de Heyne, la première, en 4 vol. in-12, Goettingue, 1782-83 ; la seconde, dans la même ville, en 1803, in-8o, 2 vol. Il n’y a de traduction ni dans l’une ni dans l’autre de ces éditions ; mais la dernière est de beaucoup préférable à la première. L’auteur de cet article en a aussi donné une édition avec une traduction française et des notes, Paris, 1805, 2 vol. in-8o. C-r.


APOLLODORE, savant médecin et naturaliste de l’antiquité, naquit à Lemnos, environ un siècle avant J.-C. ; il a vécu sous les règnes de Ptolomée Soter et de Lagus, à l’un desquels il dédia ses livres, suivant Strabon. Le scoliaste de Nicander nous apprend qu’Apollodore avait écrit sur les plantes. Pline dit qu’il a vanté le sue des choux et des raiforts, comme un remède contre les champignons vénéneux ; qu’il a parlé de l’ortie et de Peryngium. Il est souvent cité par Athénée. Il parait que c’est le même qui a écrit un traité sur les animaux venimeux, et il y a lieu de croire que c’est de son ouvrage que Galien a tiré la composition d’un antidote contre la vipère. — Il y a eu plusieurs autres Apollodore qui ont écrit sur la médecine. Pline fait mention de trois, dont l’un était de Tarente, un de Citium, et un de Pergame. D-P-s.


APOLLODORE, peintre athénien, avait porté son art à un degré de perfection inconnu jusque-là, vers la 93e olympiade, 408 ans avant J.-C. Il connut le premier l’art de fondre, de dégrader les couleurs, et d’imiter l’effet exact des ombres. Pline en parle avec enthousiasme, et ajoute, peut-être au figuré, qu’il était écrit au bas des ouvrages d’Apollodore : « Il sera plus facile de les critiquer que de les imiter. » Ses tableaux les plus remarquables étaient : un Prêtre en prières devant une idole, et un Ajax frappé de la foudre. Du temps de Pline, ces deux chefs d’œuvre existaient encore à Pergame, et y excitaient la plus vive admiration. Apollodore, fier de ses succès, se regardait comme le prince des peintres, et ne sortait jamais sans avoir sur sa tête une tiare, a la manière des Médes. Il avait écrit un traité sur les règles de la peinture. Toutefois il vit sa gloire éclipsée par celle de Zeuxis, qui perfectionna toutes les découvertes d’Apollodore. Ce dernier exhala son chagrin par des vers dans lesquels il convient de la supériorité de son rival. « J’avais trouvé, dit-il, pour la distribution des ombres, des secrets inconnus jusqu’à moi ; on me les a ravis. L’art est entre les mains de Zeuxis. » L-S-e.


APOLLODORE, philosophe épicurien, que l’on croit avoir été contemporain de Cicéron, fut le maître de Zénon de Sidon. Il gouverna, comme chef. l’école d’Épicure, et la sévérité de son administration fit donner le surnom de Cépotyrannos (Tyran du Jardin). Il avait, au rapport de Diogène Laërce, composé plus de quatre cents traités, et, entre autres, une vie d’Épicure. On ne doit point le confondre avec Apollodore le grammairien. D-l.


APOLLODORE, architecte, naquit à Damas, parvint, sous le règne de Trajan, au plus haut degré de réputation. Il la dut aux monuments nombreux, hardis et magnifiques qu’il construisit par les ordres de ce grand prince, soit à Rome, soit dans les provinces de l’empire. Les principaux étaient le forum de Trajan, construit sur l’emplacement d’une montagne qu’on abaissa de 144 pieds, et au milieu duquel s’élevait la colonne Trajane, une bibliothèque immense, un odéum, la basilique ulpienne, des thermes, des aqueducs, et enfin ce pont célèbre jeté sur le Danube, dans la basse Hongrie. Il avait vingt et une arches, larges de 170 pieds ; les piles s’élevaient à la hauteur de 150 pieds, et l’ensemble du pont à prés du double. Les pierres qui le composaient étaient d’une dimension extraordinaire. Ce gigantesque ouvrage, fait pour braver le cours des siècles, n’eut pourtant qu’une durée de quelques années. La victoire l’avait fait élever sous Trajan, la crainte des barbares le fit détruire sous Adrien ; mais ni le temps, ni les barbares, ni la fureur du fleuve rapide et profond dans cet endroit, n’ont pu empêcher que quelques piles, restées inébranlables, n’attestent encore aujourd’hui le génie d’Apollodore. Trajan, juste appréciateur du mérite, combla de faveurs cet habile artiste, avec lequel il se