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ANV

réduire considérablement l’étendue que l’on avait donnée à l’Italie, et il eut la satisfaction de voir les corrections qu’il avait faites à la carte de cette contrée confirmées par les opérations géodésiques exécutées, d’après les ordres du pape Benoît XIV, pour mesurer un arc du méridien dans l’État ecclésiastique. Ce succès surprenant tend à confirmer les différentes mesures dont il avait fait usage, et, d’après ce fait, on ne doit plus être surpris du degré d’exactitude qui a donné une si grande réputation à sa Géographie ancienne. La plupart des cartes qu’il a publiées sur cette matière ont été faites pour accompagner des dissertations sur l’histoire des peuples de l’antiquité. Nous avons eu depuis, sur les mêmes sujets, des ouvrages qui ont reculé nos connaissances ; mais les auteurs à qui nous les devons n’ont pas cru pouvoir mieux faire que de se servir des cartes de d’Anville. À l’époque où nos connaissances sur les mœurs et l’histoire des anciens peuples avaient encore de si grands progrès à faire, d’Anville, par une sagacité plus qu’humaine, semble avoir posé les limites de celles que nous pouvons acquérir sur les pays qu’ils ont habités. Cette exactitude ne paraîtrait peut-être pas extraordinaire, si nous n’avions, pour vérifier ses conjectures, que les ouvrages qui les ont fait naître ; mais ce qui est une espèce de prodige, c’est que la plupart de ses opinions ont été confirmées par ceux qui ont visité les contrées qu’il a décrites. Le comte de Choiseul-Gouffier, dans son Voyage pittoresque de la Grèce, rend hommage à l’exactitude des cartes de d’Anville. Les cartes d’Égypte, pour lesquelles d’Anville a toujours témoigné une affection particulière, ont donné à sa gloire le plus grand éclat dont elle pût être couronnée ; leur exactitude a été également confirmée par les savants français qui, d’après les ordres de Bonaparte, ont été chargés de visiter le pays et d’en dresser de nouvelles cartes. Les Anglais ont été forcés de rendre hommage à la supériorité de d’Anville, et le plus bel éloge qu’ils aient pu donner au major Rennel, le plus célèbre de leurs géographes, a été de le nommer le d’Anville de l’Angleterre. L’orbis veteribus notus, l’orbis romamus, doivent être entre les mains de tous ceux qui lisent l’histoire ancienne ; ainsi que ses cartes de la Gaule, de l’Italie et de la Grèce ancienne ; il en est de même des cartes des mêmes pays qui font partie de la géographie du moyen âge. D’Anville ne publiait guère de carte sur la géographie ancienne, sans l’accompagner ou la faire suivre d’un mémoire où il donnait, en détail, les raisons qu’il avait d’abandonner les idées de ceux qui l’avaient précédé, et d’en adopter de nouvelles. Les hommes curieux de s’instruire pourront juger, en les consultant, de la profondeur de son érudition et de la solidité de son jugement ; mais, soit que, trop occupé du fond des choses, il eut négligé de former son style, soit que, dans la discussion, il ait trop souvent paru attacher autant d’importance aux plus légères considérations qu’aux principales raisons qui devaient le déterminer, on s’aperçoit avec peine que ses idées ne sont pas développées avec cette lucidité que l’on a droit d’attendre d’un esprit aussi juste et d’un jugement aussi sain : ces mémoires ne peuvent être lus que par ceux qui se livrent à l’étude de la géographie. D’Anville a publié deux cent onze cartes et plans, et soixante-dix-huit mémoires, épars dans diverses collections et dans différentes bibliothèques. Les mémoires qu’il a composés sur les mesures itinéraires des Romains, des Grecs et des Chinois, sont les plus beaux monuments de géographie que nous possédions. D’Anville avait essayé de déterminer la figure de la terre, d’après les routes et les observations des navigateurs qui avaient fait le tour du globe ou qui avaient traversé la mer du Sud ; nous ne nous étendrons pas sur cette partie de ses travaux, à laquelle on a peut-être voulu ajouter trop de prix : les résultats qu’il en a tirés doivent être rangés dans le très-petit nombre de ses erreurs. D’Anville avait formé une collection immense de cartes tant gravées que manuscrites ; le gouvernement l’acquit en 1779, et l’en laissa jouir le reste de sa vie. Le dernier service que d’Anville ait rendu à la science fut de mettre cette collection en ordre. Quoique d’une constitution faible et délicate, il résista, depuis sa jeunesse jusqu’à un âge très-avancé, à un travail de quinze heures par jour. Il était naturellement simple et modeste ; mais la conscience qu’il avait de ses forces l’avait peut-être rendu un peu trop sensible à la critique. Deux ans avant sa mort, il perdit l’usage de ses facultés, et termina sa carrière le 28 janvier 1782, âgé de près de 85 ans. Il avait épousé, en 1730, Charlotte Testard, qui mourut en 1781, dans un temps où les infirmités de d’Anville ne lui permettaient plus de sentir le prix de ses affections ; il en avait eu deux filles, dont l’une mourut religieuse, et l’autre fut avantageusement mariée. L’éloge de d’Anville a été prononcé par Condorcet et par B.-J. Dacier ; on le trouve dans les Mémoires de l’Académie. lil. Demanne a publié la Notice des ouvrages de d’Anville, 1802, in-8o. Cette notice est composée de l’éloge de d’Anville par M. Dacier, et du catalogue des cartes et des ouvrages ou mémoires de ce géographe. Parmi ses cartes, on doit distinguer les quatorze qu’il fit pour l’Histoire ancienne de Rollin ; les douze pour l’Histoire romaine de Rollin et Crévier ; les cinq pour l’Histoire des empereurs romains, de Crévier, etc. Parmi ses ouvrages ou dissertations, on recherche : 1o  Dissertation sur l’étendue de l’ancienne Jérusalem et de son temple, 1747, in-8o, avec un plan ; elle a été réimprimée dans l’itinéraire de Paris à Jérusalem de M. de Chateaubriand. 2o  Géographie ancienne, 1768 ou 1782, 3 vol. in-12, avec cartes ; 1769, gr. in-fol., avec neuf grandes cartes. — l’ouvrage publié sous le titre de Géographie de d’Anville, par M. B. D. M., Paris, 1807, 2 vol. in-8o, avec un atlas in-fol. de 25 cartes, est de M. Barentin de Montchal. R-l.


ANWÉRY, l’un des poëtes les plus célèbres de la Perse, naquit à Bedneh, petit village dépendant du district d’Abiverd, en Khoraçan. Lorsqu’il fut en âge de commencer ses études, on l’envoya à Thous, où il y avait une célèbre académie nommée Manssourryah. Le jeune homme fit des progrès