Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 18.djvu/191

Cette page n’a pas encore été corrigée

I

186 GUI

les provinces du Danube, et pendant qu’on lui offrait en échange on ne sait quels avantages, on continuait de discuter à St-Pétersbourg et à Paris le plan de partage de ses États. Il y a apparence que Napoléon, encore incertain sur ses projets in venir, n’était sincère ni à St-Pétershourg ni à Constantinople. Quoi qu’il en soit, le général Horace Sébastiani, à qui il avait d’abord confié cette difficile mission près du sultan, avait échoué. Guilleminot ne fut pas plus heureux. Il quitta donc ce poste diplomatique, et passa dans l’état major du maréchal Bessières. Sa conduite au combat de Medina del Bio~8ecco (juillet 1808) lui valut une brigade, avec la croix d’officier de la Légion d’honneur. Il servit en 1809 en Italie. et reparut en Espagne en 1810. En 1812 il était à la lloskowa, à la tête d’une brigade du -1° corps, et pendant la fatale retraite il remplissait, à ce même corps d’armée, les fonctions de chef d’état major. Général de division en 1815, il se distingua en plusieurs rencontres, particulièrement le 5 septembre Zahna, où il battit le général prussien Bobschiltz, et le 28 à Dessau, d’où il repousse les Suédois, qui laissèrent entre ses mains quantité de prisonniers. Un mois après, chargé de maintenir les communications du 4° corps avec le gros de l’armée, il repoussa à l’arme blanche deux divisions bavaroises ; l’engagement eut lieu sur un pont, près de Hanau. l’ennemi y perdit 500 hommes. Guilleminot coopéra avec beaucoup de sang-froid à la retraite d’Allemagne. Il fut un des jeunes généraux en qui le gouvernement de la restauration plaça d’abord sa confiance. Il avait quarante ans, de beaux services, et l’on n’avait pas oublié ses anciennes liaisons avec Dumouriez, puis avec Pichegru et Moreau. Louis XVIII le nomma, à son retour, grand officier de la Légion d’honneur et chevalier de St-Louis. Lorsqu’on apprit le débarquement de Cannes et la défection des troupes du Midi, on organisa à la hâte les cadres d’une autre armée, destinée à marcher contre Napoléon. Le duc de Berry, qui devait prendre le commandement de cette armée, choisit pour chef d’état-major le général Guilleminot. Mais la marche rapide de Napoléon rendit ces préparatifs inutiles. Guilleminot était, trois mois après, chef d’état-major du maréchal prince d’Eckmiihl, qui commandait l’armée de Paris, au moment de la seconde invasion. Il alla, de sa part, porter des propositions d’arrangement au maréchal Blucher, déjà campé ã St-Cloud. Après la capitulation, il suivit l’armée sur la Loire, d’où il envoya bientôt son adhésion au gouvernement royal. Cette triste et ù jamais regrettable période des cent jours avait été plus funeste à la France que toutes ses révolutions passées. Outre le spectacle affligeant de la déection presque universelle des grands corps de l’lÎtat, des ingratitudes, des palinodies, des bassesses sans nombre, qui, en si peu de temps, deux ou trois fois répétées, vinrent déconcerter pv

GUI ›

et démoraliser les masses, on eut à subir toutes les représailles de l’Europe ; la longue occupation, les tributs de guerre et le morcellement du territoire. Le général Guilleminot, rentré en Jgracc et bientôt en faveur, fut chargé de s’enten re avec les commissaires étrangers pour flxer la démarcation de nos frontières de l’est, depuis Bade iusqu’au Piémont, conformément aux traités de 1815. Il accepta cette mission au printemps de 1816, et fut en récompense nommé à son retour directeur général du dépôt de la guerre. Il avait été compris comme lieutenant général dans le corps royal d’état-major, belle et utile institution militaire créée en 1818 par cette restauration qu’on accusait de vouloir affaiblir l’arm¢b, et à qui on reprochait tout, jusqu’à ses services. En 1825, quand le ministère de ll. de Villèle eut arrêté en principe le projet d’intervention en Espagne, plusieurs officiers généraux furent consultés sur les moyens d’exécution. Uentreprise n’était pas sans périls. D’une part, on avait à redouter quelques complots militaires, et l’on disait même qu’une partie de l’armée était prete à donner fa main aux révolutionnaires espagnols. Il y avait en France un parti qui travaillait de toutes les manières à ébranler la fidélité des troupes. D’autre part, bien qu’il ne s’aglt plus de conquérir l’Espagne, il s’aglssalt encore de lutter contre les cortès, et les souvenirs de 1808 ne pouvaient être oubliés. De sorte que ceux qui ne craignaient pas la défection des régiments craignaient au moins la défaite. Ces sinistres prédictions n’arrêtèrent pas le roi. Parmi les plans de campagne qui furent proposés on adopta celui qui était l’ouvrage du général Gnilleminot. Pour mieux en assumer le succès, le duc d’Angoulême emmena ce général avec lui, en qualité de chef d’état major. mais une manœuvre imprévue des sociétés secrètes vint, dès le début de la campagne, compromettre sa position. Des caisses remplies de cocardes et de drapeaux tricolores surmontés de l’aigle impérial furent saisies à Bordeaux ; elles étaient expédiées de Paris sur Bayonne, et adressées à M. de Lostende, un des aides de camp du major général. Il est probable qu’elles devaient être réclamées à Bayonne, au nom de M. de Lostende, par le véritable destinataire qui n’a jamais été connu, et qu’il y avait des gens qui comptaient se servir de ces emblèmes pour provoquer les soldats à la révolte. On crut à Paris, dans le premier moment, à la complicité de M. de Lostende, et l’on porta même plus haut le soupçon. Le maréchal duc de Bellune, ministre de la gütrre, fut à l’instant nommé major général, et partit en poste pour Bayonne, avec ordre de faire arrêter le comte Guilleminot. Mais le duc dütngouleme, plein d’une noble confiance dans la loyauté de son lieutenant, lui ordonna de continuer ses fonctions, et fit dire au roi qu’il résignerait lui-même son commandement si ron voulait ’pousser les choses plus loin.