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cette province, rêva qu’une flamme sortant de son corps se répandait au loin et embrassait les tentes du désert et les maisons des villes. Un checik expliqua ce songe, en lui présageant que son fils serait le chef d’une religion qui convertirait tous les Arabes. Suivant une autre opinion qui n’est pas inconciliable avec la précédente, Abd-al-Wahab fut adopté par Ibrahim, riche arabe d’une tribu différente. Dès sa jeunesse, il se distingua par son esprit, sa mémoire et sa générosité. Tout l’argent dont il pouvait disposer, il le donnait à ses compagnons. Après avoir fait dans sa patrie, ses premières études et acquis légère connaissance des lois et des sciences des Arabes, il alla passer plusieurs années à Ispahan, alors capitale de la Perse, où il étudia les maîtres les plus habiles. Il se rendit ensuite dans le Khoraçan, poussa jusqu’à Ghaznah, et revint séjourner à Bagad et à Bassora. De retour dans sa patrie naturelle ou adoptive, il soutint de nouvelles opinions qui se rapprochait de la doctrine du célèbre Abou-Hanifela (voy. ce nom), ne s’en écartant que dans l’interprétation du Coran. Plusieurs cheiks de la province d’Al-Ared, qui fait partie du Nedjed, les adoptèrent. À l’exemple, les sujets devinrent un disciple du nouvel apôtre. Cette ligue détruisit la balance politique parmi les petits princes d’Al-Ared, et il en résultat de nouvelles querelles qui devinrent d’autant plus meurtrière que la religion en était le prétexte : les deux partis s’accusaient réciproquement d’hérésie et d’incrédulité. Les cheiks qui avaient refusé de reconnaître Abd-al-Wahab pour prophète, n’étant pas en mesure de résister à ces partisans, appelèrent à leur secours Azar, cheik d’Al-Ahsa, qui redoutait pour ses États, situés vers le golfe Persique, le zèle fanatique de ces ambitieux. Les premiers troupes qu’il envoya contre eux ayant été battues, il vint en personne assiéger Abd-al-Wahab dans une forteresse de la province de Déreyeh ; mais son armée, qui qui s’était avancé jusqu’à portée de canon, fut si maltraité qu’elle s’enfuit en désordre à Al-Ahsa. Dans le même temps Mekramy, cheik des Nedjran, renommé pour sa valeur, établit aussi une nouvelle secte ; mais comme il était ami ami d’Abd-al-Wahab, et qu’il professait les mêmes principes, il agissait vraisemblablement de concert avec lui ; aussi se joignit-il au Wahabis, lorsqu’ils attaquèrent en 1763, la puissante tribu de Beni-Khaled, dans le pasy d’Al-Ahsa. Alors Abd-al-Wahab n’existait plus, il était mort depuis peu d’année, après avoir jeté, vers l’année 1740, les fondements d’une secte qui aurait pu, réalisant les prédictions de Niebuhr, causer de grands changements dans la croyance et dans le gouvernement des Arabes, si ses zélateurs, par leur cruelle intolérance et leurs horribles brigandages, n’eussent dans la suite, soulevé contre eux tous les États musulmans voisins de l’Arabie. Nous n’entrerons pas dans le détail des dogmes de la religion des Wahabis : on les trouvera à l’article du fils de leur fondateur (Voy. Mohammed.). Il suffit d’ajouter que ces sectaires ne croyaient que le Coran eût été créé par l’inspiration divine ou par l’ange Gabriel ; qu’ils regardaient comme un crime les vœux que l’on faisait dans un péril imminent ; qu’ils permettaient de tuer un agresseur sans attendre que la justice eût prononcé sur sont sort ; enfin que, n’adressant leurs prières qu’à Dieu, et rejetant les saint, ils étaient unitaires, et devinrent iconoclastes. A-t.


ABDAS, évêque persans, vivait au commencement du 5e siècle, sous le règne d’Isdegerde. Un évêque de Mésopotamie, nommé Marathas, ayant été envoyé à ce roi par Théodose le Jeune, obtint que le christianisme serait protégé en Perse, et consacra Abdas évêque de ce pays. Le bonheur facile qu’ils eurent de guérir le roi, qui se croyait possédé, augmenta encore leur crédit ; mais, en 421, Isdegerde étant mort, et son fils, Varame V, lui ayant succédé, Abdas, par un zèle inconsidéré, détruisit un temple des sectateurs de Zoroastre, adorateurs du feu. Les mages se plaignirent au roi, qui, à l’exemple de son père, avait jusque-là traité les chrétiens avec bienveillance. Ce prince se contenta d’abord de réprimander Abdas, et de lui ordonne de faire rétablir le temple, ajoutant toutefois que, s’il lui désobéissait, il ferait démolir les églises chrétiennes. Le refus d’Abdas, et l’indignation excité dans le peuple par les mages, portèrent Varane à exécuter sa menace. Alors commença une persécution dont Abdas fut la première victime. Les chrétiens de la classe commune furent abandonnés aux mages et traités avec la plus cruelle rigueur. On épargna la vie des hommes riches et puissants, dans l’espoir qu’ils deviendraient du feu ; mais on leurs fit subir les plus dures humiliations. On leur ôta leurs charges et leurs biens. Hormidas, entre autres, fut réduit à garder des chameaux : un autre seigneur eut la douleur de se voir elever sa femme, qui fut donné à l’un de ses esclaves. Les chrétiens implorèrent contre cette persécution les secours de Théodose le Jeune, et il s’ensuivit entre les sujets de ce prince et les Persans une guerre longue et sanglante, où les haines religieuses se joignirent aux haines nationales. Les Grecs finirent par avoir l’avantage ; mais trente années suffirent à peine pour éteindre ces fureurs. D-t.


ABDEL-AZYZ, seconde vice-roi arabe d’Espagne, fils de Mouça, lieutenant du calife Wésid Ier, seconda son père dans la conquête de l’Espagne, et s’empara lui-même, l’an 713 de J.-C., des provinces de Jaen, de Murcie et de Grenade. L’année suivante, il livra bataille, dans les plaines de Carthagène, au comte Théodomire, prince du sang royal des Goths, le vainquit, et, par un traité, se mit en possession des principales villes de cette province ; il assiégea ensuite Tarragone, dont la prise acheva la conquête de la péninsule. Mouça ayant rappelé à Damas, laissa à son fils le titre de vice-roi, qui lui fut confirmé par le calife Soleiman. Abdel-Azyz fit de nouvelles conquêtes : il envoya un de ses lieutenants à la tête d’une armée qui pénétra en France, et, voulant affermir son autorité, il fit venir d’Afrique un grands nombres d’Arabes auxquels il distribua des terres. Il adoucit le sort des chrétiens qui s’étaient soumis, releva les villes détruites, en con-